The Orville - New Horizons : Critique 3.02 Shadow Realms

Date : 12 / 06 / 2022 à 14h00
Sources :

Unification


THE ORVILLE NEW HORIZONS

- Date de diffusion : 09/06/2022
- Plateforme de diffusion : Hulu
- Épisode : 3.02 Shadow Realms
- Réalisateur : Jon Cassar
- Scénaristes : Brannon Braga & Andre Bormanis
- Interprètes : Seth MacFarlane, Adrianne Palicki, Penny Johnson Jerald, Scott Grimes, Peter Macon, J. Lee, Mark Jackson, Chad L. Coleman, Jessica Szohr et Anne Winters

LA CRITIQUE FM

Le passage d’une chaîne nationale, en l’occurrence FOX, au service de streaming adulte de Disney, Hulu, est certainement une bénédiction créative, car cela libère les showrunners des contraintes familiales d’un réseau mainstream. Et c’est l’occasion donc de proposer aux fans de The Orville un épisode assez horrifique. Encore faut-il ne pas se prendre les pieds dans le tapis dans la suspension d’incrédulité, mise si souvent sur le devant de la scène dans une actuelle franchise SF paramountienne.

Je passe sur le cocktail avec les Krills que je mets sur le côté humoristique incongru de la série. C’est comme si, autour d’une coupe de champagne, était organisée une fête entre le Vatican et le peuple des échangistes naturistes du Cap d’Agde.

Non, ce qui me gêne profondément, c’est quand il n’y a aucune logique dans les actions des personnages. Le Orville est donc un bâtiment qui sert à « explorer de nouveaux mondes étranges » avec nécessairement toute une liste de procédures pour assurer la sécurité de l’équipage. Passe encore que les mises en garde religieuses des Krills ne soient pas crues, mais quand on se retrouve au milieu de nulle part devant une base qui a l’air plutôt inquiétante, on pourrait penser qu’un minimum de précautions pourrait être prise.

Et bien pas du tout, l’ensemble des officiers principaux du vaisseau, accompagné par un amiral, vont sans protection dans la base. Et arrive ce qui devait arriver : la catastrophe… Mais What The F--- Si vous rajoutez à cela, qu’à aucun moment n’est expliqué comment les démons quittent le vaisseau. Plus la scène finale de dîner où on a l’impression que le drame ne vient pas de se produire. Ce n’est pas possible. À croire que Brannon Braga et Andre Bormanis ont fait un stage à la Kurtzman Academy !

Dans le même temps, je ne peux pas dire que c’est mal réalisé. Décors, maquillage de démons et effets spéciaux sont superbes. Je reconnais même la supériorité dans l’écriture des personnages de Braga. Outre l’interprétation impeccable, instantanément avec ses dialogues, on croit à 100 % à l’histoire d’amour ancienne entre l’Amiral et le Docteur.

Mais quand je ne crois plus à ce qui m’est raconté, aussi brillant que puisse être le reste, la magie n’opère plus pour moi. Bref, juste la moyenne pour cet épisode, en espérant que la qualité scénaristique de la série va retrouver des couleurs la semaine prochaine.

LA CRITIQUE YR

Tandis que The Orville 03x01 Electric Sheep se voulait un épilogue (hélas un peu trop tardif) de The Orville 02x08+02x09 Identity, The Orville 03x02 Shadow Realms se présente comme le sequel de The Orville 02x10 Blood Of Patriots… dans lequel avait été signé le Lak’vai Pact of Tarazed 3 (une résolution qui actait la fin des hostilités entre l’Union et les Krills, et ouvrant sur la possibilité d’une alliance).

Résumé commenté

Voici donc enfin le premier bénéfice de cette nouvelle "entente" avec les théocrates fanatiques krills : la possibilité de traverser leur espace pour accéder au Naklav Sector, totalement inexploré. Le vice-amiral Paul Christie – qui se révélera être l’ex-mari de jeunesse (25 ans plus tôt) de la Dr Claire Finn – sera chargé de conduire les négociations pour la Planetary Union avec le même ambassadeur KTZ pour le compte des Krills (toujours interprété par l’excellent vétéran trekkien John Fleck). Ce dernier exigera une concession d’exploitation minière d’harcanium dans le système Obrall en contrepartie d’un droit de passage (dans un premier temps pour un seul vaisseau et moyennant le placement à bord d’un "tracking beacon" c’est-à-dire d’un mouchard).
En dépit de ces contraintes, l’équipage de l’USS Orville célèbrera cet événement par la plus incongrue des fêtes, tentant d’unir la carpe et le lapin. Des des Klingons à un dîner mondain, les Krills resteront d’autant plus hermétiques à ces festivités qu’ils ne feront pas mystère de leur impatience à vaincre les Kaylons (un péril justifiant leur alliance de circonstance et contre-nature avec l’Union) pour pouvoir reprendre ensuite leur "combat divin" contre toutes les formes de vie de l’univers (comme leur prescrit leur religion). Il est d’ailleurs ironique de voir que la PU n’a eu d’autre choix que de s’allier à une puissance exterminatrice (organique) pour contrer une autre puissance exterminatrice (synthétique)... De la pure realpolitik, quoique non dépourvue de nuances comme ne cesse de le dévoiler les épisodes…

Mais parce que la soif d’exploration est autant inscrite dans l’ADN de The Orville que du real-Star Trek, l’attention de l’Union s’est immédiatement et en priorité portée sur le Kalarr Expanse, la zone la plus mystérieuse du Naklav Sector et aussi la plus opaque (un trou sans étoiles d’au moins 800 parsecs d’envergure). Les Krills auront eu beau user de toute leur autorité pour vaticiner les dix plaies d’Egypte si d’aventure l’USS Orville s’aventurait dans un espace dont leur livre sacré (l’Anhkana) annonce qu’il est hanté par des démons à huit yeux s’emparant des âmes innocentes en leur faisant commettre les dépravations les plus inqualifiables… rien n’y fera. Parce que le dogme trekkien/orvillien est trop profondément ancré dans l’esprit des héros, parce que l’appel exploratoire est aussi irrésistible que le chant des sirènes… et peut-être aussi parce que l’obscurantisme religieux des Krills ne crédibilise guère leur témoignage.
L’équipage convainc avec le plus grand empressement l’amiral Halsey de les laisser se plonger dans le Pandémonium promis par les Krills, et le vice-amiral Paul Christie renonce même à gagner l’Outpost 55 (où il était attendu) pour se joindre avec enthousiasme à l’expédition, y compris sur le terrain dans les "away teams". Après avoir traversé l’espace Krill, et contemplé un extraordinaire paysage spatial du Naklav Sector encore virginal pour eux, les protagonistes mettront le cap vers le néant — évoquant grandement les "voids" de ST VOY 05x01 Night et ST VOY 07x15 The Void...

Comme dans Alien (1979) de Ridley Scott, l’USS Orville captera des tréfonds du Kalarr Expanse un message de détresse… auquel le Nostromo n’aurait jamais dû répondre. Mais l’exploration est une philosophie de vie. Ce n’est donc pas la très inquiétante station spatiale apparemment vide (mais active), nimbée d’une lumière orange perçant les ténèbres… qui dissuadera tout le staff de l’USS Orville (le vice-amiral Paul Christie, le capitaine Ed Mercer, la XO Kelly Grayson, le Dr Claire Finn, la cheffe de la sécurité Talla Keyali et l’ingénieur en chef John LaMarr) d’y pénétrer sans combinaison (et sans précaution particulière).
L’intérieur présentera toutes les apparences d’une structure organique (jusqu’au sphincter d’entrée/sortie comme dans ST TMP). Mais durant une innocente séance d’observation, un réceptacle lumineux proéminent — parmi plusieurs autres encastrés dans un "mur" — s’ouvrira quelques secondes devant le visage du vice-amiral sans aucun effet immédiat...

De retour sur l’USS Orville, apparemment bredouille, l’équipage s’apprêtera à explorer plus avant le Kalarr Expanse... et c’est alors que le drame surviendra ! Brett… enfin Paul sera saisi de violente douleur et convulsions… mais au lieu de voir surgir de son thorax un xénomorphe gluant (ayant fait de son corps un utérus)… c’est lui-même qui se transformera en "démon à huit yeux et aux énormes crocs" !
La Dr Finn ayant bien réussi à ralentir la mutation, allongé — déjà largement défiguré — sur un lit d’infirmerie, Christie aura quelques ultimes échanges avec son amour de jeunesse (toujours épris d’elle). Mais l’issue tragique était actée, et Paul paiera très cher l’inconscience confondante d’une vie entière passée derrière un bureau...
Comme le vice-amiral n’a pas été préventivement entravé (ni surveillé par qui que ce soit), la métamorphose achevée, il prendra discrètement la fuite pour désactiver le réacteur du vaisseau (le plongeant ainsi dans le noir) avant de contaminer les membres de l’équipage un par un.
Un nouveau détachement venu de l’USS Orville — mais solidement équipé cette fois (un peu tard !) de combinaisons de type Hazmat et d’instruments de collecte et de prélèvement — constatera que les réceptacles lumineux de la station spatiale organique ressemblent curieusement à des corolles... et lorsqu’elles s’ouvrent brièvement, c’est non pour projeter des pollens (meïose d’une reproduction sexuée donc endogame) mais pour projeter des spores (mitose d’une reproduction asexuée donc potentiellement plus dangereuse si exogame). Et en effet, ces spores sont de nature microbiennes... et elles réécrivent à grande vitesse l’ADN des humanoïdes ! Puis lorsqu’iceux sont transformés, ils envoient à leur tour des spores sur les autres, mais dans un variant plus efficace encore, transformant n’importe quel sujet en monstre de cauchemar en seulement quelques secondes ! Qu’il s’agisse d’une cruelle évolution naturelle ou le fruit d’une biotechnologie (ou le synthétique aurait rencontré le biologique comme chez les Borgs quoique différemment), The Orville 03x02 Shadow Realms aura ainsi l’insigne honneur d’offrir les scènes les plus épouvantablement gores de l’histoire télévisuelle !
Et pendant ce temps, le message de détresse émis par la station s’est transformé en message de ralliement... Soit le worst case scenario.

La suite de l’épisode est un classique de l’épouvante, déjà vu des dizaines de fois — de The Exorcist de William Friedkin (1973) à The Fly de David Cronenberg (1996) en passant par Hellraiser de Clive Barker (1987) — mais à la forme bien maîtrisée et équilibrée, assurément angoissant. À visionner absolument dans le noir comme l’avait recommandé Seth MacFarlane en interview. Et avoir plongé dans de vraies ténèbres les décors du vaisseau représente un renouvellement aussi astucieux qu’économique...
Se succèderont diverses péripéties très efficaces, incluant la restauration partielle de l’énergie du vaisseau, des courses-poursuites de John LaMarr par les monstres dans les Jefferies tubes, la terreur des enfants Ty et Marcus Finn, l’indifférence des aliens devant le robot Isaac... Finalement, la super-force de la Xelayan (Talla) et les armes à particules de l’équipage réussiront à maîtriser la petite dizaine d’équipiers métamorphosés…

Mais aucun happy end facile cette fois. Claire ne trouvera hélas pas assez d’ADN originel chez les victimes pour renverser leur mutation, et l’absence de pattern de téléportation dans cette société orvillienne ne permettra pas de reconstituer les informations perdues, d’autant plus que l’arrivée d’un vaisseau partageant la signature de la station ne laissera guère le temps pour développer un quelconque remède — l’USS Orville n’ayant pas récupéré l’intégralité de ses ressources (notamment en matière de défense et de quantum drive). Dès lors, la Dr Finn bricolera un virus létal diffusé par aérosol pour contraindre l’alien qui fut naguère Paul Christie à renoncer à contaminer le reste de l’équipage et rejoindre pacifiquement le vaisseau en approche.
Malheureusement, la mémoire et les connaissances de "feu" le vice-amiral pourront désormais représenter une menace pour les autres humanoïdes, et l’acte de "générosité" de l’USS Orville (ne pas assassiner l’équipage transformé et le livrer à ses "nouveaux" semblables) pourrait aussi être un acte de cruauté envers les humains qu’ils étaient... et d’irresponsabilité, car susceptible d’avoir fait naître un nouveau Némésis pour l’Union, voire même pour tous les autres humanoïdes.
Les retrouvailles entre Claire et son ancien mari n’auront cessé d’émailler tout l’épisode tel un refrain, quoique pudique (facteur soap très contenu), mais rendant la tragédie finale d’autant plus douloureuse. Et c’est sur la mémoire de Paul et dans le cadre tamisé du bar Mooska’s... qu’Isaac trouvera à nouveau un chemin aigre-doux pour renouer avec la doctoresse...

Analyse

De prime abord, The Orville 03x02 Shadow Realms est une espèce de best of de l’imaginaire horrifique audiovisuel. Absolument tous les ingrédients du genre se voient réunis, y compris les très classiques erreurs (ou incohérences comportementales) alignées par les héros en pareil cas (en l’occurrence ne prendre aucune précaution pour explorer le "château hanté", ne pas attacher le personnage qui en train de devenir "autre", etc.) ainsi que divers angles morts (pourquoi l’USS Orville était-il si désert durant la désactivation du réacteur ? comment s’est déroulé le contact et "l’échange" avec le vaisseau alien du Kalarr Expanse ?).
Dès lors, il serait permis d’accorder à cet épisode un zéro pointé, puisqu’il semble n’être qu’un alignement de pompages éhontés enfilés comme autant de perles, une masse critique de clichés et de citations audiovisuelles (jusqu’aux angles de caméra et aux storyboards), sans aucune valeur propre ni ajoutée apparente. Peu ou prou comme le #FakeTrek de Kurtzman en somme.

Et pourtant, à bien y regarder, The Orville 03x02 Shadow Realms est en réalité une construction méta, qui ne dissimule aucunement ses nombreuses sources d’inspiration (tous les emprunts y sont plus-que-transparents) et qui ne cherche pas à faire accroire qu’il a réinventé l’eau tiède. En fait, l’épisode joue de façon gourmande avec tous les codes du genre, en les détournant parfois subtilement, ou via diverses mises en abyme trekkiennes. C’est là une façon de renouer avec le second degré dans lequel s’est forgé The Orville, pas forcément toujours par l’humour potache (si cher à Seth MacFarlane), mais aussi sous l’angle de l’hommage, du trompe l’œil, de la parodie assumée, voire de l’outrance tragique. Chaque fois que le spectateur est tenté de prendre la série trop au sérieux ou du moins au premier degré, s’ensuit une piqûre venant rappeler le nécessaire cum grano salis.

The Orville 03x02 Shadow Realms est également une plongée dans l’univers mental — côté quartier interdit — du plus prolifique et de l’un des plus talentueux scénaristes de Star Trek, l’incontournable Brannon Braga ! Qui plus est avec la complicité du conseiller scientifique ayant succédé à Naren Shankar et passé lui aussi du côté de l’écriture, à savoir André Bormanis. Le scénariste du chef d’œuvre ST TNG 06x21 Frame Of Mind s’est manifestement fait plaisir en revisitant dans un environnement proto-trekkien disposant d’une belle production value (dont il n’avait pas forcément bénéficié auparavant) nombre des thèmes, des genres et des styles qui lui sont chers hors et dans Star Trek. Quitte à naviguer sans complexe entre le meilleur et le pire...
Nous retrouvons donc ici un écho d’une des créations dont Braga peut légitimement être le plus fier, à savoir le Delphic Expanse de la troisième saison la série Enterprise, c’est-à-dire un environnement angoissant et inhospitalier, où tous les protocoles et les codes de conduite civilisés n’ont plus cours, où les lois naturelles/physiques et l’expérience professionnelle ne cessent d’être défiés, qui plus est avec une touche de Cycle de Tschaï de Jack Vance. Si bien qu’il serait presque loisible de regretter que toute la troisième saison de The Orville ne soit pas un survival prenant place dans le Kalarr Expanse... rien que pour éprouver les idéaux utopiques de la Planetary Union.
Mais The Orville 03x02 Shadow Realms est aussi un remake — ou du moins une variation — des très braguiens ST TNG 04x18 Identity Crisis et ST ENT 03x03 Extinction qui mettaient en scène des espèces (respectivement les Tarchannes et les Loque’eques) dont le mode de reproduction naturel ou la survie collective consistaient à "absorber" génétiquement d’autres espèces humanoïdes.
Il y a en outre dans l’air quelques relents trekkiens de ST TOS 01x25 This Side Of Paradise (des spores qui transforment les sujets), de ST TNG 07x19 Genesis, de ST VOY 02x15 Threshold, ST VOY 03x12 Macrocosm, de ST VOY 05x04 In The Flesh pour diverses formes de mutations génétiques, si ce n’est qu’ici l’espèce 8472 (inventée aussi par Braga) sera déclinée dans une "version Cronenberg"...
Enfin, The Orville 03x02 Shadow Realms est un nécessaire contrepoint à l’idéalisme parfois hagiographiques des premiers contacts. Du coup, c’est ni plus ni moins ST First Contact du même auteur qui bascule soudain dans Event Horizon de Paul WS Anderson (1997), pour un tableau terrifiant qui manquait au Panthéon trekkien alors qu’il y aurait eu toute sa place...

Sarcastiquement, les WTF de procédure (exploration sans précautions de l’inquiétante station par tout le staff, passivité à l’infirmerie envers la métamorphose du vice-amiral...) peuvent épingler la relative naïveté d’une humanité n’ayant encore jamais été confrontée à ce type de péril (à l’instar de l’équipage sur LV-223 dans le Prometheus (2012) de Ridley Scott) tout en égratignant certaines procédures en vigueur dans le real-Star Trek.
Par exemple, l’usage qui consistait à envoyer tous les officiers supérieurs dans les détachements au sol, exposant ainsi simultanément tout la ligne de commandement, est un trait caractéristique de ST TOS lorsque Kirk et/ou Spock étaient presque de chaque "away team" (mais le "hasard" les épargnait toujours tandis que seuls les red shirts écopaient). Ce parti pris fut pas mal raillé dans les années 70 (par rapport aux forces marines du monde réel ou le pacha est toujours le dernier à se mettre en danger), si bien que ST TNG avait ensuite "corrigé le tir" (Picard sortait rarement). Pourtant, histoire de respecter la continuité diachronique, ST ENT était revenu au fondamentaux puisque Archer allait autant sur le terrain (si ce n’est davantage) que Kirk. Durant un échange dans un bonus, Ronald D Moore avait lui-même critiqué cette inclination de Star Trek (totalement abrogée dans son BSG 2003), alors que Brannon Braga (pourtant réputé moins fan de ST TOS que Moore) la défendait en estimant que c’était là l’esprit de la NASA (le commandant est celui qui prend le plus de risques, les subordonnés étant de toute façon formés pour pouvoir le remplacer).
Il n’empêche que le "désir d’utopie" transparait à chaque microseconde de cet épisode de The Orville, jusqu’à la bêtise s’il le faut, comme pour réaffirmer son ADN trekkien — un peu trop bruyamment parfois. À l’exemple de l’ignorance par la XO Kelly Grayson du passé matrimonial de la Dr Claire Finn... qui pourrait effectivement être sanctuarisée à la vie privé dans les forces armées d’une société authentiquement utopique.

Ironiquement, la majorité de toutes ces sources d’inspiration proviennent des productions antérieures du co-scénariste lui-même, du moins sur le fond ! Impossible donc de lui faire un mauvais procès pour plagiat. Un véritable auteur est fondé à avoir des obsessions (dans le bon sens du terme), tels David Lynch ou Clive Barker. Par bien des côtés The Orville 03x02 Shadow Realms tient d’un "pèlerinage" que Brannon Braga fera dans les tréfonds non pas de son subconscient, mais de son propre parcours créatif.
Mais par-delà tout ça, le second épisode de The Orville New Horizons s’inscrit surtout dans la mythologie de l’athéisme que Brannon Braga avait eu à cœur à défendre tout au long de son œuvre et à travers des conférences, telle une préfiguration étatsunienne et science-fictionnelle du Traité d’athéologie de Michel Onfray (2005).
Or tout l’enjeu repose ici sur ce que n’importe quelle foi (et pas seulement la religion criminelle des Krills) interpréterait spontanément comme démoniaque. Le vecteur de reproduction de l’espèce Kalarr Expanse (et sa manifestation physique) est un pur cauchemar, une perversion morale (puisque reposant sur l’atteinte non pas seulement à la vie comme dans une prédation classique mais également à la dignité et à l’identité d’autrui). Et pourtant, il s’agit "seulement" ici d’une loi naturelle. Il est probable que jamais la Planetary Union n’eût encore été confrontée à un péril aussi traumatisant. Mais contre toute attente, l’équipage de l’USS Orville a d’emblée réagi avec une exceptionnelle maturité collective, dépassant le champ de apparences, des préjudices individuels, des réflexes démonologiques !
En somme, outre quelques coups de griffes bien sentis typiquement braguiens (comme lorsque Paul déclarera « All religions are confusing. How do you think the priests stay in business ? »), cet opus offre une démystification implacable dans la plus haute tradition trekkienne, tout en refusant de se positionner sur une quelconque échelle axiologique. Toute les croyances demeurent démystifiables, mais elles reposent malgré tout souvent sur des bases réelles, à l’instar les mythes.
Soit une configuration de vraie SF.

Le message de l’épisode est sans aucun doute foncièrement trekkien : les démons ne sont que des aliens, et même si ces aliens ont une apparence monstrueuse et possèdent un mode de reproduction criminel, ils ont eux aussi le droit à l’existence et tout doit être fait pour les épargner.
Mais ironiquement, ledit message pèche peut-être par excès (multiples). Car il pourrait s’avérer funeste à terme d’avoir laissé en vie les "aliénisés" de l’équipage, et les "livrer" à leurs "semblables" pourrait être aussi tragique pour le plus grand nombre que le réveil des Wraiths par des Terriens au début de Stargate Atlantis. Mine de rien, au nom de l’humanisme, on laisse partir un amiral chez l’ennemi, avec des décennies de secrets militaires et de données tactiques. Comme un relent d’idiocratie (quoique pas de la même nature que dans le #FakeTrek de Secret Hideout ni dans des proportions comparables). En outre, le détachement des personnages est tel qu’ils ne semblent guère avoir été bouleversés, ni même affectés par le sort abject qui s’est abattu sur une partie de leurs collègues et amis.
Entre l’impatience incontinente à explorer et le manque de prudence durant l’exploration, la maturité sociétale dissimulerait-elle une immaturité spatiale, presque Bisounours, témoignant donc d’une Planetary Union plus jeune que l’United Federation of Planets, ou à l’inverse ayant hérité d’un état pacifié du known universe grâce au travail oublié de générations antérieures ? Ou bien est-ce le fait d’une série qui n’a pas encore vraiment réussi à se prendre totalement au sérieux ?
Quant à l’épisode lui-même, il s’est peut-être abimé sur la fin dans un mauvais goût comme Brannon Braga aime parfois à les cultiver (le défaut de ses qualités), par exemple lorsque la Dr Finn dit benoîtement à Isaac à propos de son ex-mari venant de subir les pires outrages et viols imaginables : « Paul was a special person. I’m just glad I got to see him one last time. » !!! Vraiment ? Est-ce tout ce que cette tragédie sans nom inspire à Claire ? Une inconséquence triviale et une indifférence indigne... ou bien à l’inverse une maturité émotionnelle si grande qu’elle laisse planer un malaise ? Gageons que ce parti pris est intentionnel de la part des scénaristes pour figurer une société futuriste fort différente de la nôtre...
Toujours est-il que la finalité diégétique de cet épisode est peut-être d’introduire (à la truelle ?) les nouveaux "méchants" de la troisième saison... que les héros se seraient eux-mêmes fabriqués par une empathie ou une charité à contremploi. À moins que ce soit une capitalisation pour l’avenir, sans suite immédiate. Voire un simple loner malgré les accents menaçants finaux à la façon de ST TNG 01x25 Conspiracy...

Les effets spéciaux constituent le "state of the art" actuel, quoique parfois trop irréels par leur beauté CGI, mais en évitant cependant tout viol flagrant des réalités cosmiques par esthétisme.
Quant à la partition musicale de John Debney, elle s’avère toujours inspirée, véhiculant une "Jerry Goldsmith touch" éloquente, tout en réussissant à se faire plus discrète que dans la plupart des productions imaginaires contemporaines.

Conclusion

Quel paradoxe que ce The Orville 03x02 Shadow Realms...
Susceptible de provoquer chez certains un rejet pour ses miscellanées de clichés horrifiques et d’emprunts nostalgiques tout azimut presque "dignes" du #FakeTrek kurtzmanien... mais capable de susciter chez d’autres un engouement pour son atmosphère immersive, son rythme exemplaire, et sa soif d’exploration.
Mais moins l’exploration du cosmos... que l’exploration de la culture pop (à la manière d’une "SF spaghetti") et surtout... que l’exploration de la culture Trek par son auteur prépondérant himself... se lâchant ici sans complexe (pour un "pèlerinage" très personnel).
On retrouve dans The Orville 03x02 Shadow Realms un peu du meilleur de Brannon Braga (goût pour exploration, puissance de démystification, mythologie de l’athéisme, SF barrée, finesse générale d’écriture...), mais (hélas) aussi pas mal du pire (auto-pompages, obsessions horrifiques, mutations gores, mauvais goût assumé, propension pour le malsain et l’incongru), parfois même au voisinage de son "infameux" ST VOY 02x15 Threshold.
Pourtant, le résultat a quelque chose de méta, de jouissif en mode bord-cadre, d’envoûtant par ses outrances, de brillant à sa curieuse façon. Et assurément de plus complexe qu’il n’y paraît au premier regard. Avec à la clef plusieurs niveaux de lecture et un message authentiquement trekkien, en réalité trop trekkien (jusqu’à l’absurde ou au suicide). Fait rare, même les quelques incohérences (ou WTF) peuvent faire figure de partis pris volontaires pour des paradigmes à tiroirs.
Alors peut-être (?) est-ce le "pire" de Brannon Braga. Mais le "pire" de Brannon Braga reste très supérieur au "meilleur" de beaucoup d’autres…

NOTE ÉPISODE

NOTE STAR TREK

BANDE ANNONCE - EXTRAITS



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