Jacky au royaume des filles : Rencontre avec les citoyens de la République de Bubunne

Date : 25 / 12 / 2013 à 12h15
Sources :

Unification


Lors de la projection du film Jacky au royaume des filles suivi de la rencontre avec le réalisateur Riad Sattouf, la productrice Anne-Dominique Toussaint et l’acteur Anthony Sonigo, Pathé avait prévu une organisation aux petits oignons.

A l’accueil se tenait un gueux en voilerie supervisé par une femme très élégante dans son uniforme. Les femmes avaient droit à une entrée privilégiée tandis que les gueux devaient prendre un chemin parallèle pour aller en salle de projection.
A l’entrée de la salle, un gueux en chef, toujours correctement habillé de sa voilerie, envoyait les gueux de leur côté de la salle de projection. Il ne s’agissait pas en effet de polluer le côté de la salle des femmes de leur présence impie. Lors de la projection il y avait plus de gueux que de femmes, mais le gueux en chef a permis à ces dernier de partager l’espace des femmes tout en leur précisant de ne pas les indisposer en les touchant ou en leur parlant. En effet ces derniers avaient eu l’outrecuidance de venir à la projection sans leur voilerie et leur cheveux dévoilés pouvait troubler les femmes présentes et les détourner du film documentaire sur la formidable République démocratique et populaire de Bubunne.
Inutile de dire que l’ensemble met bien dans l’ambiance du film et que c’est plutôt du côté des femmes que les rires ont fusé.

A l’issus de la projection, Riad Sattouf (RS), Anne-Dominique Toussaint (ADT) et Anthony Sonigo (AS) sont venus dans la salle pour répondre aux questions des spectateurs.
Voici la rencontre telle que nous l’avons vécue (à l’exception des rares spoilers du film qui ont été enlevés).

Y a-t’il une sortie mondiale du film prévue ?

ADT  : la sortie en France est pour le 29 janvier 2014. C’est le premier pays dans lequel le film sort. La première mondiale aura lieu au festival de Rotterdam en janvier 2014. Le film a déjà été acheté en Allemagne, Belgique et Suisse. Mais pour l’instant nous ne connaissons pas encore la perception du film par les spectateurs et nous ne savons donc pas quels sont les pays qui seraient intéressés par l’achat du film.

Dans le film on voit une grande fresque sur un mur, puis plus tard des tableaux représentant la famille de la générale (dirigeante de la République démocratique et populaire de Bubunne). Est-ce vous qui les avez dessinés ?

RS  : c’est moi qui aie fait les croquis, mais c’est Youssef, un peintre sénégalais qui vit en Géorgie qui les a peints. En fait j’avais vu des tableaux fait par ce peintre et je lui ai demandé de faire les tableaux et les portraits du film. Pour l’anecdote Youssef voulait quitter le Sénégal et a pris un billet pour l’Europe, mais il s’est retrouvé en Géorgie et finalement il y ait resté.

Est-ce que les géorgiens ont participés au film ?

RS  : Quand nous sommes arrivés dans le village où se passe une grande partie du film, nous avons expliqué l’histoire du film aux habitants. Ils connaissaient Cendrillon et l’idée d’en faire une version inversée les a beaucoup amusés. Du coup nous avons eu plein de figurants volontaires.
AS  : Quand nous sommes arrivés en Géorgie, nous étions 4 acteurs en tenue. Mais arrivé dans le village nous avons vu une trentaine de figurant en tenue. On se sentait moins seuls.

Quel est le point de départ du film ?
RS  : j’ai fait une bande dessiné Pascal Brutal. Dans une histoire courte publiée en 2005, il y a un pays avec un coup d’état et une prise de pouvoir par les femmes. Et les hommes doivent alors porter une tenue de virilité. Cette histoire est le point de départ de mon scénario.

Une question aux acteurs de la part du gueux en chef qui faisait l’accueil dans la salle de projection : porter la voilerie est pénible, au bout de deux heures on meurt de chaud. Comment avez-vous pu le supporter pendant le tournage ?

AS  : En fait porter le costume n’était pas si chaud que cela. Le plus difficile était qu’il était serré, surtout au niveau de la tête. En ce qui concerne les sous-vêtements, je les a gardé chez moi pendant tous le tournage, mais ne les a pas portés en permanence.

Avez-vous fait un story-board du film ?

RS  : oui j’ai fait un story-board pour ce film au contraire de mon premier. En effet il y a beaucoup de scènes de foule et de grosses scènes au contraire des Beaux gosses qui a laissé la place à beaucoup d’improvisation. La durée du tournage a été de 10 semaines. Les 4-5 premières se sont déroulées en France dans des studios (pour les scènes intérieures) puis nous sommes partis en Géorgie pour préparer la suite du tournage et nous avons ensuite passé encore 5 semaines à tourner les scènes. Au final le tournage a démarré le 24 septembre pour finir juste avant Noël 2012.

On retrouve dans Jacky beaucoup de personne du casting des Beaux gosses. Est-ce qu’on va les retrouver dans vos prochains films, comme si ils faisaient partie de la famille ?

RS  : Anthony a tourné avec moi dans une série publicitaire. Les autres ont tourné dans mon premier film. J’aime bien reprendre des acteurs qui ont commencés avec moi et qui m’ont fait confiance. J’ai plus de distance avec des acteurs célèbres. Je ne me dis pas que je vais les appeler pour aller boire un coup avec eux.
AS  : Riad s’énerve de temps en temps sur le tournage (RS  : pas tant que ça !). Mais il y a une confiance entre nous.
RS  : j’ai pensé à Anthony dès l’écriture du scénario. Ainsi qu’à d’autres acteurs célèbre et je suis très content qu’ils aient tous participés au film.

Comment avez-vous convaincu Charlotte Gainsbourg de participer à votre film ?

RS  : j’ai envoyé le scénario à son agent. Elle l’a lu et apprécié, mais à dit non. Elle avait peur d’être enfermée dans un certain type de film. Je l’ai rencontré deux fois et on n’a parlé, notamment du visuel du film qu’elle avait du mal à appréhender, et finalement elle m’a donné son consentement. Par la suite la plus grande peur de Charlotte Gainsbourg était de savoir si l’uniforme lui allait bien et tombait bien.

Je suis allé à une soirée cinéaste avec Michel Azanavicius et vous aviez largement parlé de Didier Bourbon et de l’admiration que vous lui portez. Lors de l’écriture de votre scénario aviez-vous pensé à lui, et à d’autres acteurs célèbre, ou cela s’est-il décidé plus tard ?

RS  : si je pense à un acteur lors de l’écriture du scénario, j’ai peur qu’il refuse. Mais j’adore Didier Bourbon et du coup j’avais encore plus peur qu’il refuse de participer à mon film. Et c’est ce qui s’est passé ! Il a dit non car il n’avait pas lu le scénario pour cause de manque de temps. Mais peu de temps avant le début du tournage, il a dit oui.

En ce qui concerne Anémone, j’avais lu une interview d’elle ou elle disait avoir regretté d’avoir eu des enfants et j’ai apprécié sa franchise. J’ai tout de suite pensé à elle pour ma générale. J’adore cette actrice, mais je regrette qu’on ne l’ait pas vu autant que ces confrères du splendide.
Quand j’ai fini mon scénario, j’avais ma liste rêvé pour les rôles. On a écrit des lettres qu’on a envoyées et finalement j’ai eu le casting dont j’avais rêvé.
Quand à Michel Azanavivius, il est arrivé plus tardivement sur le film.

Est-ce vous qui avez réalisé la musique de Jacky comme John Carpenter dans ses films ?

RS  : oui je l’ai fait moi-même. Dans les Beaux gosses j’avais participé à la musique, mais cette fois-ci, à l’exception des thèmes militaires, j’ai tout fait.
Dans Jacky je joue aussi Mit Kronk, et dans les Beaux gosses j’interprétais un acteur porno.

Pourquoi avez-vous créé une religion et gardé une tenue discriminante ?

RS  : ce n’est pas un processus voulu. La voilerie pourrait rappeler certaines tenues musulmanes, mais ce n’est pas le cas. La voilerie est faite dans une seule pièce avec la capuche intégrée dans la robe. C’est une tenue plus proche de ce que l’on retrouve dans une centrale nucléaire avec un anneau au niveau du coup qui montre le statut de l’homme.
Mon frère est un musulman très croyant, et quand je lui ai montré la voilerie, ça l’a fait rigoler car il a cru que c’était une tenue chrétienne (comme les sœurs de la religion chrétienne).
Moi-même je ne suis pas croyant et ça m’a amusé de créer une religion autour des chevaux. D’ailleurs quand le cheval parle dans la tête de Jacky, est-ce que c’est un vrai télépathe ou alors s’agit-il de la folie de Jacky ? Moi seul aie la réponse.
En ce qui concerne l’anneau porté par les hommes autour du cou, lorsqu’il est vide : l’homme est célibataire, plein : il est marié et demi-plein il est engagé.

Riad Sattouf, vous avez des petits rôles dans vos films. Vous êtes très drôle. N’avez-vous pas envie d’avoir un rôle principal ?

RS  : non car si je suis bon je peux aussi être très mauvais et je n’ai pas envie d’avoir un premier rôle. J’ai refusé un film (qui va bientôt sortir en France) qu’on m’a proposé dans lequel j’aurais eu le rôle principal. Mais il y avait beaucoup de scènes de sexe et surtout une scène avec une bataille de polochon qui devait être jouée nue. Et ça ce n’était pas possible pour moi.

Dans votre Cendrillon inversé, pourquoi avez-vous utilisé des décors naturels ?

RS  : je voulais des décors réels dans mon film. Le pays où j’aurais voulu tourner est la Corée du Nord, mais ce n’était pas possible. La Géorgie est un ancien pays du bloc des pays communistes. L’architecture y est bizarre. Le palais de la grande bouilleuse est un vrai bâtiment. Il s’agit de la mairie de la ville de Gori, ville natale de Staline. Des décors naturels permettent aussi d’avoir un lien avec la réalité. Lors de la grande époque du communisme, toute tentative d’être un individu vous éjectait de la société.
En dehors du tournage, on sortait, on allait au marché sur lequel on trouvait des passeports, des masques à oxygène…
Lors du tournage, la scène du discours de la générale a eu lieu au moment ou le gouvernement pro-européen et anti-Russie a perdu contre un milliardaire proche de la Russie. La situation était donc tendue.
Devant le palais nous avons installé un décor avec un échafaud et les vieux applaudissaient en disant « Ha on va pendre des gens ! ». Ca leur rappelait ce qu’il se passait dans leur jeunesse.

Votre idée des chevalin vous a été inspiré par l’Inde et ses vaches sacrées ?

RS  : pas vraiment. Je voulais faire un film qui montre la séparation des sexes, l’animisme, la réincarnation. Mais j’avoue avoir utilisé la couleur orange de certaines voileries comme rappel du bouddhisme. Et je me suis inspiré de la Corée du Nord pour l’uniformisation des tenues et les uniformes, ainsi que les maisons. Et Charlotte Gainsbourg est cool en uniforme.

Dans votre film la couleur des voileries est variée. A part le blanc pour les tenues du bal, y a-t-il un code pour les différentes couleurs ?

RS  : Les couleurs étaient en général un camaïeu de rouge. En fait j’ai choisi la couleur la plus forte pour ressortir dans un univers gris et terne. Les différentes couleurs permettent d’avoir l’illusion d’être différent des autres. Mais en fait on reste dans un cadre bien défini. Les matières et tissus des voileries peuvent aussi être différents. Quand au blanc il symbolise la pureté. Le grand couillon garde aussi son cabotin particulier (le cabotin est la calotte que les hommes portent sur leur tête dans les grandes occasions).

La typographie du film est particulière. Pourquoi l’avoir créée ?

RS  : la typographie a été crée par une graphiste, Fanette Mellier, avec dans l’idée de donner une impression oppressante de l’écriture. Elle rappelle une toile d’araignée et augmente la difficulté de l’écriture. D’ailleurs dans la scène où on voit Jacky écrire, la typographie rajoute un effet bizarre à la scène.

Avez-vous été touché par la polémique du mariage pour tous (concernant certaines allusions du film) ?

RS  : la première version du scénario a été finie avant l’élection de François Hollande et le tournage a été fini avant cette polémique. J’ai voulu opposé dans mon film la famille, le sexe et l’amour libre.

Qu’en ait-il de la complicité des deux personnages masculins, Jacky et son mentor Jutin ?

RS  : Jutin joué par Michel Hazanavicius rêve de changer de vie alors que les autres hommes veulent avoir un héros qui les fait rêver. La fin du bal a été perçue par certains comme la vrai fin du film. Mais je ne voulais pas l’arrêter comme ça car je trouve terrible la façon dont se fini Cendrillon. Ce n’est pas une fin satisfaisante pour moi.

Avez-vous écrit une fin alternative à celle du film ?
RS  : non c’est la fin que j’ai voulu.

Si votre histoire de Cendrillon était réelle, comment serait le monde ?

RS  : l’histoire serait hyper bizarre. Cendrillon repose sur le mythe du prince charmant. Cendrillon est ultra maltraitée, mais elle ne se plaint jamais ; elle est ultra-soumise. En fait, c’est un conte de la soumission. Mais le coup du prince charmant est très gênant car c’est toujours au garçon de faire le premier pas.

L’interview s’est finie sur ces derniers mots et Riad Sattouf, Anne-Dominique Toussaint et Anthony Sonigo sont resté en derniers pour répondre à quelques questions.
Merci à eux et à Pathé pour nous avoir accueilli dans de telles conditions.

Vous pourrez retrouver bientôt sur notre site la critique de Jacky au royaume des filles. Mais en janvier n’hésitez surtout pas à aller voir le film. Vous ne le regretterez pas.


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