Sympathie pour le diable : La critique
Sympathie pour le diable est un très bon film revenant sur le siège de Sarajevo que l’on va suivre du point de vue du journaliste Paul Marchand, qui était présent sur place.
Ce tragique événement s’est déroulé au 20ème siècle, à partir de 1992, dans un pays voisin de la France en Europe, la Bosnie. Et il évoque finalement bien peu de souvenirs quand on parle de ce tragique siège. Pourtant, ce dernier a duré quatre ans, ce qui en fait un des plus longs sièges recensé dans l’histoire humaine.
Le scénario de Guillaume de Fontenay, Guillaume Vigneault et Jean Barbe se base sur le livre éponyme de Paul Marchand qui revient sur les événements qu’a vécus l’auteur. Le récit montre très bien le désespoir croissant du journaliste, correspondant pour de nombreuses radios et télévisions francophones. En effet, alors que le siège s’enlise et que la population locale est frappée quotidiennement par des obus et des tirs de snipers, l’opinion internationale ne s’intéresse pas aux malheurs de ce pays européen. Le récit suit le journaliste dans son émancipation progressive de son devoir de non-ingérence et on découvre sa façon parfois maladroite de tentative d’aide de la population locale.
Le film de Guillaume de Fontenay est très proche du documentaire et permet de s’immerger dans une situation dont la reconstitution du siège de Sarajevo est extrêmement vivace. On a vraiment l’impression de se retrouver deux décennies en arrière et de vivre une situation terrible à laquelle les habitants finissent par s’habituer, malgré l’horreur chronique. L’œuvre n’est pas sans rappeler ce qu’il se passe à l’heure actuelle dans certains pays. Elle montre les mêmes mécanismes de désintérêt de la communauté internationale et d’impuissance de l’ONU qui semble parfois ne servir qu’à compter les explosions et les morts, et à ne surtout pas intervenir entre les différents protagonistes.
L’interprétation de Niels Schneider est absolument formidable. Ce dernier semble être la doublure parfaite du véritable journaliste Paul Marchand. Il donne une véritable personnalité à son personnage haut en couleur, très bel hommage au véritable auteur. Il est très juste et montre bien cette dualité plus sombre qui a justifié le titre du film et cette personnalité sans peur qui l’a poussé à prendre d’énormes risques. Vincent Rottiers est très bon en journaliste, ami du personnage principal. Et Ella Rumpf est vraiment intéressante en jeune traductrice permettant à ceux-ci de se déplacer et de traverser les lignes ennemies.
Le travail sur les décors de Sanda Popovac et de Patric Valverde est très impressionnant. Il est associé à une belle photographie de Pierre Aïm très dure et froide qui renforce l’horreur quotidienne de ce que l’on voit. Le spectateur a vraiment l’impression de se retrouver dans un autre monde, dont l’empreinte du socialisme soviétique est toujours extrêmement prégnante et où la peur des tirs fait déserter un certain nombre de lieux.
Sympathie pour le diable est un très bon film d’une grande puissance ayant le grand mérite de remémorer un siège tragique qui a fait des milliers de victimes dans une véritable indifférence. Avec un sujet véridique extrêmement fort, une mise en scène s’employant à le mettre en valeur et des comédiens formidables, cette plongée au cœur de l’enfer n’est pas agréable, mais assurément nécessaire. En ayant le mérite de rappeler des horreurs s’étant produites dans un passé proche et qui perdure malheureusement aujourd’hui dans d’autres pays, le long métrage montre aussi ce qui est le meilleur dans l’humanité : sa résilience, son entraide et sa capacité à se satisfaire de petites joies.
Impressionnant et tragique.
SYNOPSIS
Sarajevo, novembre 92, sept mois après le début du siège. Paul Marchand, journaliste, tente de témoigner d’une guerre fratricide, du quotidien des 400 000 habitants pris en otages par les troupes serbes sous le regard impassible de la communauté internationale. Provocant il inscrit sur sa voiture les fameux MORITURI TE SALUTANT et DON’T WASTE YOUR BULLET I’M IMMORTAL.
Entre l’objectivité journalistique, le sentiment d’être inutile et un certain sens du devoir, face à l’horreur et à l’injustice de ces victimes innocentes, Paul Marchand prendra parti. « Dans le souffle chaud des explosions, dans l’odeur solennelle du sang et de la poudre, j’étais enfin chez moi. Chaque matin j’appareillais vers la mort dans mon voyage de destruction. Journaliste, je devais raconter avec des mots de ruines, dans une langue inachevée, que les guerres ne sont rien d’autre qu’un peu de bruit sur beaucoup de silence, un fracas passager quand le silence devient trop insupportable… Un rêve de monde meilleur, même si le rêve est obscène et turbulent. »
BANDE ANNONCE
FICHE TECHNIQUE
Durée du film : 1 h 40
Titre original : Sympathie pour le diable
Date de sortie : 27/11/2019
Réalisateur : Guillaume de Fontenay
Scénariste : Guillaume de Fontenay, Guillaume Vigneault, Jean Barbe d’après l’œuvre de Paul Marchand
Interprètes : Elisa Lasowski, Niels Schneider, Ella Rumpf, Arieh Worthalter, Vincent Rottiers, Clément Métayer, Izudin Bajrovic, Adnan Omerovic, Toussaint Colombani, Ejla Bavcic, Emir Pasanovic, Aldin Tucic
Photographie : Pierre Aïm
Montage : Mathilde Van de Moortel
Costumes : Sanja Dzeba, Céline Guignard
Décors : Sanda Popovac, Patric Valverde
Producteur : Pascal Bascaron, Nicole Robert, Jean-Yves Robin, Marc Stanimirovic pour Monkey Pack Films, Go Films, Nexus Factory, Logical Pictures
Distributeur : Rezo Films
LIENS
PORTFOLIO
Les illustrations des articles sont Copyright © de leurs ayants droits. Tous droits réservés.