Les étendues imaginaires : La critique
Les étendues imaginaires est un très bon film traitant des immigrés à Singapour et de leur traitement, notamment par leurs employeurs.
Un enquêteur recherche un ouvrier disparu et va arpenter son lieu de travail, son dortoir, et les endroits qu’il fréquentait. À travers ces déambulations se dresse le portrait d’un pays en pleine mutation, gagnant quotidiennement du terrain sur la mer. Des travaux gigantesques nécessitant le travail journalier d’un grand nombre de personnes.
Le scénario de Siew Hua Yeo alterne avec brio l’histoire du policier, et celle de l’ouvrier. Tous deux insomniaques et errant une partie de la nuit dans divers lieux, leurs destins s’entremêlent subtilement et le récit entraîne le spectateur dans une histoire de plus en plus tortueuse. On passe d’ailleurs de l’un à l’autre des points de vue jusqu’à une fin trépidante et surprenante.
De plus, le film trouve un bel écho dans l’acharnement de l’île à s’étendre. Une construction artificielle dénuée de sentiments s’opposant au cheminement intérieur des protagonistes se rêvant dans un ailleurs moins froid et plus humaine.
Siew Hua Yeo filme avec un grand talent son histoire. Il offre un écrin nocturne ponctué de chantiers et de lumière artificielle aux oubliés de la société singapourienne. Ces milliers de travailleurs anonymes dont la disparition n’émeut personne.
Il met très bien en valeur ses protagonistes et offre une plongée vivace au cœur d’un microcosme sans sentiment et d’une grande dureté. Certaines de ses scènes sont très belles et parfois d’une poésie crépusculaire poignante.
Le casting est très bon. Peter Yu campe très bien un enquêteur acharné. Xiaoyi Liu est sympathique en ouvrier déraciné. Et Yue Guo est troublante en employée d’un cybercafé ouvert en continu.
Il faut d’ailleurs saluer l’impact de ce cybercafé anxiogène et illuminé qui participe pleinement à l’aventure et apporte quelques très belles scènes au long métrage.
Les étendues imaginaires est une œuvre dense et sombre présentant la plongée dans un monde peu montré. Entre l’enquête d’un inspecteur tenace et la tranche de vie d’un ouvrier déraciné, le récit est à la fois captivant et touchant. Le spectateur est propulsé dans une existence difficile, ponctuée de quelques plaisirs fugaces et de rêverie éveillés créant une ambiance très prenante qui impacte longtemps le ressenti.
Poisseux et ensorcelant.
Le film a eu le Léopard d’or eu Festival de Locarno 2018.
Vous pouvez voir aussi ci-dessous la présentation du film par son réalisateur, et scénariste Siew Hua Yeo et son actrice principale Yue Guo. L’image est malheureusement très sombre à cause du manque de lumière de la scène.
SYNOPSIS
Singapour gagne chaque année plusieurs mètres sur l’océan en important des tonnes de sable des pays voisins – ainsi que de la main d’oeuvre bon marché.
Dans un chantier d’aménagement du littoral, l’inspecteur de police Lok enquête sur la disparition d’un ouvrier chinois, Wang, jusqu’alors chargé de transporter des ouvriers. Après des jours de recherches, toutes les pistes amènent Lok dans un mystérieux cybercafé nocturne.
BANDE ANNONCE
FICHE TECHNIQUE
Durée du film : 1 h 35
Titre original : A Land Imagined
Date de sortie : 06/03/2019
Réalisateur : Siew Hua Yeo
Scénariste : Siew Hua Yeo
Interprètes : Xiaoyi Liu, Peter Yu, Jack Tan, Yue Guo, Ishtiaque Zico, Kelvin Ho, George Low, Andie Chen
Photographie : Hideho Urata
Montage : Daniel Hui
Musique : Damien Guillaume, Wei Yong Teo, Gilles Benardeau
Costumes : Meredith Lee
Décors : James Page
Producteur : Fran Borgia pour Productrice, Film de Force Majeure, Volya Films, Akanga Film Asia
Distributeur : Epicentre Films
LIENS
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