Le silence des autres : La critique

Date : 10 / 02 / 2019 à 09h00
Sources :

Unification


Le silence des autres est un remarquable documentaire revenant sur les exactions franquistes et la volonté de certaines victimes de faire juger les coupables.

En effet, en 1977, peu après la mort de Franco, une loi d’amnistie générale a été votée en Espagne afin de ne plus revenir sur le passé et de cesser de diviser le pays en deux camps. Une loi dont un certain nombre de cadres du franquisme a bénéficié, restant en poste ou montant plus haut sur l’échelle sociale.

Ce genre de loi a été voté dans plusieurs de pays, notamment d’Amérique du Sud, après la fin des dictatures sous le joug desquels ils étaient. Néanmoins, progressivement, les lois ont été abrogées, conduisant, par exemple, à la condamnation du général Pinochet.

Les lois internationales, et le fait que les crimes contre l’humanité n’aient pas de prescription, ont poussé un collectif à attaquer certains de leurs anciens bourreaux par le biais de l’Argentine. Une action menée par un juge étranger permettant de contourner la loi ibérique.

Le documentaire retrace chronologiquement 5 années de combat et donne la parole à quelques-uns des plaignants expliquant leur cas. Leur témoignage est édifiant, d’autant plus que certains n’osaient pas parler à leur famille de ce qu’ils, ou leurs proches, ont subi : torture, viol, mise à mort, spoliation...

Car, et cela est magnifiquement montré, la votation du texte dans les années 70 a entraîné une chape de silence autour des évènements du passé. Une omerta allant jusqu’à ne même pas citer cette loi, et ses conséquences, dans l’enseignement des jeunes espagnols.

Le documentaire d’Almudena Carracedo et de Robert Bahar se regarde comme un thriller. On est suspendu aux lèvres des divers intervenants. Et l’émotion atteint son comble lors de la restitution des ossements d’une fosse commune à sa famille. Un passage touchant et anxiogène où l’étendue des morts absurdes dévoilés devant nos yeux est un triste révélateur de la tragédie humaine qu’est la vie sous un régime dictatorial.

D’ailleurs, une victime énonce bien son incompréhension en disant qu’il est toujours considéré comme un criminel dans son dossier, alors que des personnes ayant torturés et tués vivent en paix et dans le confort.

De plus, le collectif est rejoint par des femmes dont l’enfant leur a été enlevé à la naissance. Des mères dont la vie a été brisée par la fausse nouvelle du décès de leur nourrisson. Un vol tragique, malheureusement employé aussi dans d’autres pays, mais poussé à une échelle impressionnante pendant des décennies, même après le trépas de Franco.

L’œuvre est captivante. Elle évite le pathos et les images horribles pour se recentrer sur les vivants. La plupart ne souhaitent d’ailleurs pas se venger, mais veulent une reconnaissance officielle de ce qu’ils ont subi et que la justice soit rendue à l’encontre de ceux qui ont participé aux exactions. Certaines plaintes ont aussi pour vocation de permettre le regroupement familial dans les cimetières. Un élément fort dans un pays très catholique ou la famille a beaucoup de poids. Et la re-personnification des individus enterrés à plusieurs dizaines dans des fosses communes parfois anonymisées.

Le silence des autres est un excellent documentaire parlant d’un sujet fort sur des évènements qui se sont passés jusqu’à côté de chez nous, il n’y a pas si longtemps. Véritable révélateur de l’âme humaine, dans sa noirceur, mais aussi sa résilience et ses valeurs positives, le long métrage est captivant. L’oubli n’est jamais une solution, et rendre hommage aux victimes d’injustice ne peut que pousser l’humanité vers le haut.

Nécessaire et admirable.

SYNOPSIS

1977. Deux ans après la mort de Franco, dans l’urgence de la transition démocratique, l’Espagne vote la loi d’amnistie générale qui libère les prisonniers politiques mais interdit également le jugement des crimes franquistes.
Les exactions commises sous la dictature et jusque dans les années 1980 (disparitions, exécutions sommaires, vols de bébés, torture) sont alors passées sous silence.
Mais depuis quelques années, des citoyens espagnols, rescapés du franquisme, saisissent la justice à 10.000 kilomètres des crimes commis, en Argentine, pour rompre ce « pacte de l’oubli » et faire condamner les coupables.

BANDE ANNONCE


FICHE TECHNIQUE

- Durée du film : 1 h 35
- Titre original : El silencio de otros
- Date de sortie : 13/02/2019
- Réalisateur : Almudena Carracedo, Robert Bahar
- Scénariste : Ricardo Acosta, Robert Bahar, Almudena Carracedo, Kim Roberts
- Interprètes : María Martín, José María Galante, Carlos Slepoy, Ana Messuti, Maria Servini, Felisa Echegoyen, María Ángeles Martín, María de las Mercedes Bueno, Ascensión Mendieta
- Photographie : Almudena Carracedo
- Montage : Ricardo Acosta, Almudena Carracedo, Kim Roberts
- Musique : Leonardo Heiblum, Jacobo Lieberman
- Producteur : Robert Bahar, Almudena Carracedo pour Semilla Verde Productions, Lucernam Films, Blue Ice Docs, El Deseo, Independent Television Service (ITVS), Latino Public Broadcasting, P.O.V.
- Distributeur : Sophie Dulac Distribution

LIENS

- SITE OFFICIEL
- ALLOCINÉ
- IMDB

PORTFOLIO

Le silence des autres



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