O Mecanismo : Review de la Saison 1

Aujourd’hui, les fictions basées sur des crimes, des investigations et des procès historiques constituent une part essentielle de la production cinématographique et télévisuelle. Depuis le 23 mars 2018, la plateforme Netflix enrichit le genre avec sa nouvelle création originale : O Mecanismo. D’origine brésilienne, cette série a été développée par le réalisateur José Padhila (Narcos) et surtout la scénariste Elena Soarez (Filhos do Carnaval).

Après les narco-trafiquants colombiens (Narcos), José Padhila s’attaque au mécanisme de corruption et de blanchiment d’argent mis en place par les élites politiques et économiques brésiliennes, dévoilé en 2014. Pour ce faire, il adapte librement le livre de Vladimir Netto intitulé Lava Jato - le Juge Sergio Moro et les coulisses de l’opération qui a secoué le Brésil.

O Mecanismo n’adopte pas le même parti-pris que Narcos. Elle ne cherche pas véritablement à retranscrire à l’écran un évènement historique. Ici, certains évènements et les personnages principaux qui mènent l’enquête sont fictifs. Toutefois la réalité n’est jamais très loin. Les entreprises " Pétrobrasil " et " Miller et Brecht " sont les pendant fictifs des géants du BTP brésilien" Petrobras " et " Oderbrecht " mis en cause dans cette sombre machination. Et il est question d’un ancien président brésilien dénommé Higino, qui ressemble " vachement beaucoup " à l’ancien président Lula.

Le fait que l’enquête Lava Jato soit toujours en cours peut expliquer ce parti-pris d’écrire une fiction un brin éloignée de la réalité. Néanmoins, le courage des créateurs de la série est à saluer dans la mesure où l’affaire touche les très hautes sphères de la politique brésilienne actuelle. Par ailleurs, la série s’intéresse moins au système corrompu qu’aux femmes et hommes intègres qui l’affronte avec acharnement. En effet, à l’instar de Narcos, les scénaristes tissent les portraits des protagonistes des deux camps. De manière globale, le traitement des personnages est un peu inégal. Evidemment, les personnages les plus intéressants sont ceux qui se basent sur les protagonistes réels de l’opération Lava Jato.

Le problème de O Mecanismo réside dans le rythme un peu expéditif de l’investigation. En fait, la première moitié de la saison donne l’impression d’un empressement vers le dénouement de l’enquête, la révélation du gros scandale qui secoue le brésil. Les preuves à charge se dévoilent et s’enchaînent sans que le difficile travail des enquêteurs soit véritablement mis en scène, ce qui grève sensiblement l’intérêt des personnages. Ce rythme expéditif nuit surtout à l’intelligibilité du très complexe système de blanchiment d’argent, " le lavage express " au cœur de l’intrigue, qui n’est que partiellement exploré. En quelque sorte, les informations, les preuves, les personnages, prennent de l’ampleur sans que la série n’ait véritablement pris la peine d’exposer les enjeux. Heureusement, le show bénéficie d’une réalisation maîtrisée qui illumine surtout vers la fin, une intrigue, au premier abord, sombre et désespérée. Il faudra donc attendre la dernière partie de la saison pour que la série commence à tisser une réflexion sur le " Mécanisme ".

Le regard qu’elle porte sur la condition de l’homme « intègre » dans un système corrompu est la grande qualité du show. José Padhila démontre sans équivoque que le " Mécanisme " fait en sorte que chaque citoyen n’ait rien à gagner à être intègre. Pire, l’intégrité ne mène qu’à la ruine alors que la corruption mène à l’opulence. Dans la série, la vie sombre, difficile et appauvrie des gens intègres tranche clairement avec la vie lumineuse et la richesse ostentatoire des puissances corrompues. En ce sens, un système démocratique gangréné par la corruption est un profond vecteur d’injustice sociale. Néanmoins, à son insu, ce système contient aussi le terreau de sa propre destruction. En effet, le sentiment d’impunité, la richesse et la vanité des gens corrompus nourrissent la rancœur et le besoin de justice de la population. Et ce sont ces mêmes sentiments qui fondent la motivation des policiers et des juges intègres qui s’attaquent à des Goliaths économiques et politiques corrompus.

Finalement, malgré le talent indéniable de l’équipe créative et les éléments historiques qui lui servent de base, la première saison de O Mecanismo, en tant que show policier, est une semi-déception.

Néanmoins, la dernière partie de la saison laisse clairement à penser que le meilleur de la série est à venir.

O Mecanismo doit également être saluée pour son courage de mettre en image le mal qui ronge toutes les démocraties dans le monde : les compromissions entre les élites politiques et économiques au détriment de la population gouvernée. Elle mérite surtout d’être regardée parce qu’elle porte une réflexion intéressante sur les motivations, les sacrifices des gens intègres, et les injustices qu’ils subissent.

  Nombre Episodes : 8
 Titres : Lavage express – Halva – Un vent froid qui vient du sud -Le faux mur – Les yeux rouges – Ils savaient – Dernier souffle – Le jour du jugement
 Date de première diffusion : 23/03/2018 (Netflix)
 Réalisateurs : José Padilha (ép 1) – Felipe Prado (ép 2, ép 3) – Mairzee Almas (ép 3) – Marcos Prado (ép 4, ép 5, ép 6) – Daniel Rezende (ép 7, ép 8)
 Scénariste : Elena Soarez

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