L’assassin qu’elle mérite : La critique du tome 4

Date : 09 / 11 / 2016 à 08h30

Par : Christophe Dasse

Sources :

Unification France

L’assassin qu’elle mérite
Tome 4 : Les Amants effroyables

Scénario : Wilfrid Lupano
Dessin : Yannick Corboz
Editeur : Vents d’Ouest
Date de sortie : 12 octobre 2016
Nombre de pages : 56
ISBN : 9782749308180
Format : 240 x 320 mm
Prix : 14.50 €

Lire les premières pages

De l’art de réussir sa vengeance...

Paris, 1900. Victor a finalement sauvé Léna, celle qu’il avait prévu d’assassiner pour se venger d’Alec ! Dès lors, comment parvenir à faire payer son ancien mentor ? La réponse se trouve peut-être dans la lettre de revendication qu’il a subtilisée à ses nouvelles fréquentations. Un couple de révolutionnaires qui compte faire exploser le prestigieux palais de l’électricité, alors même que le débat sur la modernité frappe le Paris de l’Exposition Universelle...

Le talentueux Wilfrid Lupano s’inspire du bouillonnement artistique et scientifique du début du XXe siècle pour écrire une fable passionnante portant une réflexion sociologique et humaniste. Un véritable succès public et critique, sublimé par le trait délicat et sensuel de Yannick Corboz. En fin d’album, un cahier graphique de 8 pages rassemblant croquis, esquisses et aquarelles.

Décryptage
Tout se déroule de travers pour Victor, il vient de sauver de la noyade la femme qu’il projetait de tuer pour faire souffrir Alec, celui qui a fait de lui un assassin. Les options s’amenuisent et il lui reste à dissuader les 2 anarchistes de ne pas commettre leur exaction et la confrontation directe avec son ancien mentor qui ne tournera pas du tout comme se l’attendait Victor.

Alec veut frapper fort, il veut mettre à mal la société en s’attaquant au progrès technologique qui passe par l’arrivée de l’électricité. Mais d’un coup, l’auteur nous prend à contre-pied dans ce que l’on croyait être une course effrénée contre la montre pour enrayer cet attentat. Les apparences sont trompeuses et c’est une histoire d’amour qui se cache derrière ce mélodrame, même si la finalité est la même, le moyen d’y arriver va différer. Le dessein ultime se découvre et diffère grandement de ce que l’on pensait à l’origine. Cet attentat fomenté était un acte d’amour désespéré d’un détraqué pour retrouver son amour perdu. Du coup l’histoire prend une toute autre dimension, tout autant tragique parce l’acte d’amour de Léna est aussi beau qu’atroce. C’est très touchant, très émouvant tout en étant aussi très dur.

De fait, une nouvelle fois, le récit prend une tournure inattendue et c’est ce qui fait la force de cette série. Impossible d’anticiper ce qu’il va arriver. Le dessin comme l’ambiance a changé, il est sombre, tendu, plus sexy aussi, plus adulte et moins colorés et festifs. Le dessin a encore gagné en maturité et en qualité, certaines planches (je pense à Léna sur le canapé) sont juste de petites œuvres d’art. Le scénario distille son lot habituel de messages, comme les inégalités dans la société, le business de l’exposition (avec la petite claque au passage pour les moteurs français comparé aux moteurs allemands), l’emprise de l’argent, l’emprise psychologique sur quelqu’un (doublement illustrée sur ce tome), la peur du changement, la bataille entre l’ancien et le nouveau monde.

Voilà qui clôt donc à merveille cette remarquable série dense portée par les sentiments, qui a mûri dans le temps et qui est une franche réussite. On attend avec impatience de voir ce que nous réservera la suite pour l’un ou l’autre des 2 artistes qui ont œuvré sur cette série et qui ont su lui insuffler une âme. Merci à eux pour le voyage.