[Théâtre] Anquetil tout seul : La critique

Date : 10 / 09 / 2016 à 11h15
Sources :

Unification


Anquetil tout seul est une excellente pièce de théâtre portée par trois formidables acteurs qui permettent de retracer la vie du grand coureur cycliste dont beaucoup ont déjà entendu le nom, mais peu, surtout parmi les jeunes générations, connaissent les exploits.

Avec un personnage pareil, inutile d’en créer un de fiction. Ses courses, son comportement, notamment vis-à-vis de la diététique, sa relation à l’argent, ses prises de position sur le dopage et sa vie privée suffisent à en faire un protagoniste hors norme qui aurait peut-être même eu du mal à passer dans un roman de fiction tant l’individu était hors norme.

La pièce repose sur le texte éponyme de Paul Fournel (Editions du Seuil / Editions Points, 2012) qui retrace la vie d’Anquetil. Le rôle du narrateur est d’ailleurs tenu par l’un des trois acteurs.

Mais, même si on a peu d’affinités pour le sportif et le cyclisme, cette mise en scène d’une vie tantôt héroïque, tantôt épique, est tellement captivante que le spectateur dès la magnifique et envoûtante ouverture de la pièce est happé dans cette dernière et n’en ressort qu’une heure et quart plus tard, repu et parfois essoufflé devant tant d’énergie déployée.

Car la pièce est souvent anxiogène, lorsque l’acteur jouant Anquetil refait les courses célèbres de ce dernier et qu’on vit et souffre avec lui à chacun de ses coups de pédales.

Il faut d’ailleurs souligner la remarquable mise en scène de Roland Guénounqui, aidé par le jeu impressionnant des acteurs, qui est franchement captivante. Cette dernière associée à une scénographie impeccable faisant appel à des projections et des enregistrements sonores, nous entraîne vers une époque révolue dans laquelle les commentaires et réactions du public sont extrêmement vivaces.

La scène est d’ailleurs dépouillée. Un grand écran au fond, et cinq petits écrans, de part et d’autre de ce dernier, décalés les uns des autres, servent aux diverses projections. Les plus impressionnantes sont celles d’une route parcourue à vive allure dont la vitesse se calque sur le coup de pédale d’Anquetil.

L’acteur qui incarne se dernier passe d’ailleurs la quasi-totalité de la pièce sur un vélo posé au centre de la scène sur des rouleaux. Il peut ainsi, tout en énonçant son texte, pédaler, parfois dans une lumière tamisée le laissant seul au cœur du noir. Cet effet optique donne vraiment l’impression de voir le cycliste prendre vie et avaler des kilomètres de route.

Matila Malliarrakis qui incarne le champion est fantastique. Le comédien est incroyable dans son rôle et réussi à lui donner vie d’une belle façon en ne ménageant jamais sa peine sur son vélo. Son mimétisme donne presque l’impression de voir le champion de retour d’entre les morts. Que ce soit en pédalant ou en interagissant avec les deux autres acteurs, sa prestation est saisissante.

Clémentine Lebocey qui incarne sa femme est très bonne et apporte légèreté et luminosité à un personnage hors norme. La relation de Janine Anquetil avec son mari est passionnante et le duo d’acteur, très complémentaire et à l’unisson, a une présence importante sur scène.

Quant à Stéphane Olivier Bisson, c’est l’homme-orchestre de la pièce. Il incarne plusieurs individus, narrateur, coureurs cyclistes, entraîneurs, et réussi à donner à chacun une personnalité propre qui renvoie l’impression de voir différents acteurs sur scène. Un beau jeu, à l’unisson de ses co-acteurs, qui maintient une véritable magie sur scène autour d’un champion cycliste aussi imposant.

Anquetil tout seul est une pièce incroyable et addictive au plus haut point. Une véritable expérience visuelle et sonore dans laquelle la qualité des acteurs entraîne les spectateurs dans une autre dimension. Avec une mise en scène formidable et inspirée, une scénographie millimétrée, la vie d’un homme fascinant et des comédiens bluffants, il ne faut pas hésiter à découvrir une pièce vraiment hors du commun.

Ébouriffant et palpitant.

INFORMATION

Les représentations de cette reprise ont lieu du mardi au samedi à 19h00 et tous les dimanches à 17h00 au Studio Hébertot (78 bis rue des Batignolles 75017 Paris) du 6 septembre au 13 novembre 2016.

- RÉSERVATION
- SITE OFFICIEL

SYNOPSIS

Qui ne s’est pas identifié, parfois jusqu’au mimétisme à un grand champion ? Qui n’a pas tenté d’imaginer ce qui se passe dans sa tête ?

Le texte de Paul Fournel se présente comme un récit. Celui d’une passion pour Anquetil, cet immense champion populaire qui, paradoxe incompréhensible, était admiré mais mal aimé du public. C’est aussi la tentative de percer le mystère Anquetil, la part d’ombre de ce personnage hors norme, sulfureux, transgressif, qui s’est affranchi des lois du sport et de la morale commune aux autres hommes. C’est enfin le plaisir de retrouver tous les personnages pittoresques qui l’ont aimé, entouré, accompagné dans sa vie sportive et intime : Janine son épouse et complice, Sophie sa fille, Géminiani son mentor, Darrigade son fidèle équipier, Poulidor l’ennemi juré que la presse et le public avait dressé contre lui…


DISTRIBUTION

  • Texte : Paul Fournel (publié aux Editions du Seuil / Editions Points)
  • Adaptation théâtrale et mise en scène : Roland Guénoun
  • Jacques Anquetil : Matila Malliarrakis
  • Janine Anquetil : Clémentine Lebocey
  • Le narrateur / Géminiani : Stéphane Olivier Bisson
  • Scénographie : Marc Thiebault
  • Vidéo : Leonard
  • Musique : Nicolas Jorelle
  • Lumières : Laurent Beal
  • Son : Yoann Perez
  • Costumes : Lucie Gardie
  • Durée : 1h15
  • Public : tout public
TARIFS

Jusqu’au 18 SEPTEMBRE 2016, les places à moitié prix : 12 € par téléphone ou au guichet / 13 € par notre site Internet

  • Plein tarif : 26 euros
  • Tarif réduit (chômage, intermittence, +65 ans, Pass 17)  : 19 euros
  • Moins de 26 ans : 10 euros
NOTE D’INTENTION DU METTEUR EN SCÈNE

J’ai choisi d’adapter ce texte au théâtre pour sa beauté rude, la résonnance en moi de la « passion » Anquetil, la puissance évocatrice des courses imaginaires de « Maitre Jacques », l’intemporalité des thèmes abordés, le dopage, l’argent, la gloire, l’amour…

Très vite, la ligne dramaturgique pour transposer le livre au théâtre s’est imposée : comme dans sa vie de champion, comme dans l’image qu’il a pu laisser au public, le personnage d’Anquetil est, tout au long de ce « récit théâtralisé » sur son vélo, dans un effort physique non simulé, pour faire ressentir la réalité de la douleur du champion qui puise dans ses ressources les plus profondes. Il est entouré de sa femme Janine, qui joue de sa beauté, de sa détermination, de sa soumission pour conduire habilement le destin de son champion et le sien et d’une cohorte de personnages qui surgissent du souvenir et de l’imagination d’un troisième personnage, le Narrateur.

Pour exprimer l’étendue et la force de ce livre d’images, les souvenirs réels ou fantasmés, la multiplicité des personnages qui ont entouré Anquetil, j’ai choisi d’ utiliser des projections, d’ images fixes ou animées sur des panneaux écrans qui constituent le décor unique et épuré de ce récit. Ces projections, soutenues par une musique originale, n’interviennent pas en substitution d’un décor, elles participent du style du récit, de son caractère impressionniste, subjectif, en contrepoint onirique de l’effort physique réel du comédien.

Ces options dramaturgiques et esthétiques, placent le spectateur dans un statut de confident et de témoin d’une histoire. On ne lui délivre pas un message, mais on lui donne à voir les épisodes, certains réels d’autres imaginés, d’un parcours de vie unique, en le renvoyant à sa liberté de jugement sur un personnage toujours source d’énigme, et sur son amoralité.

Roland Guenoun

GALERIE PHOTOS

Anquetil tout seul



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