[Théâtre] Le Lièvre Blanc d’lnaba et des Navajos : La critique

Date : 11 / 06 / 2016 à 10h15
Sources :

Unification


Le Lièvre Blanc d’lnaba et des Navajos est une œuvre inédite créée spécialement pour fêter les 10 ans du Musée du quai Branly et du Théâtre Claude Lévi-Strauss niché en son sein.

Il y a 10 ans, le spectacle Mahabharata du metteur en scène japonais Satoshi Miyagi associé aux 27 comédiens et musiciens du Shizuoka Performing Arts Center (SPAC) avait fait l’inauguration du Théâtre Claude Lévi-Strauss.

En 2016, ils reviennent avec une création originale sur les mythes en trois parties. La première se focalise sur ceux japonais, la deuxième sur ceux des Indiens Navajos et la troisième s’inspire du recueil L’Autre face de la lune écrit par Claude Lévi-Strauss qui s’interroge sur les similitudes entre ces divers mythes en se posant la question d’un mythe fondateur oublié. C’est cette histoire originale qui est interprétée dans la partie finale du spectacle.

Disons-le de suite, la pièce est éblouissante et incroyable. C’est un immense moment de théâtre mélangeant avec bonheur jeu scénique, chant, musique, danse et effets lumineux dans une prestation intense et d’une immense puissante d’une heure 45.

Les trois parties ont chacune leur identité propre. Les costumes changent en partie et surtout les magnifiques masques qui accompagnent les divers personnages les mettent très bien en valeur. Ces masques sont franchement somptueux, en paille et sobres pour la partie japonaise, colorés et immenses pour celle indienne.

La mise en scène est éblouissante. Il est même difficile de tout découvrir tant ce qui se passe est foisonnant. Il faut aussi signaler la grande inventivité de la disposition de la scène. En effet, un immense rideau constitué de petites perles permet d’isoler le centre de la scène. Ce dernier est en partie transparent et permet de découvrir les chanteurs et musiciens qui sont séparés du public. De magnifiques jeux de lumière le rendent complètement opaque dans le début de la deuxième partie offrant un passage onirique incroyable alors que des masques se dévoilent succinctement quand ces derniers s’approchent de cette frontière de perles. Puis, il se relève pour dévoiler l’intégralité de la très belle scène du théâtre Claude Lévi-Strauss dans la dernière partie.

Dans le premier segment, on peut découvrir de nombreux figurants interprétant aussi bien crocodiles que dieux, rongeurs qu’arbres… accompagnés à merveille par des musiciens et chanteurs. Un calligraphe dessine les éléments importants de l’histoire en même temps que cette dernière se déroule. Drames, amour, défis ponctuent une narration scénique très claire dans laquelle le passage des masques des personnages principaux (le lapin et le héros) d’un artiste à l’autre crée une belle émotion.

En seconde partie, les chanteurs se retrouvent en avant-scène. L’intrigue se recentre et le rideau délimite l’intrigue. Plus resserré, le conte gagne en intensité et se démarque de la première partie.

La dernière séquence voit la scène s’ouvrir et les artistes se séparer par sexe. Les hommes se mettent aux instruments pendant que les femmes chantent avant que les positions ne soient inversées, les deux groupes accompagnant les artistes qui jouent les rôles principaux.

Vive, dynamique et d’une incroyable précision, cette mise en scène est bluffante. Les artistes sont tous excellents et, passant d’un personnage à un autre avec grand talent, ils envoûtent littéralement le public.

Musique et chant, déclamation et danse, coup de théâtre et utilisation à merveille d’accessoires font du spectacle un show incroyable qui laisse sans voix.

La très belle écriture du texte que l’on découvre surtitré, car interprété en japonais, permet de découvrir d’étonnantes similitudes entre mythes japonais et Indiens : entre passeurs grincheux, beaux-pères maléfiques, défis à surmonter et amour à conquérir. Des thématiques qu’on pourrait sans doute découvrir dans d’autres cultures si on se penchait dessus.

Le Lièvre Blanc d’lnaba et des Navajos est un spectacle incroyable comme il n’est pas souvent donné l’occasion de découvrir. La maestria de la réalisation, le brio des interprètes et l’inventivité abondante font de la pièce une œuvre qui sort des limites de la scène et s’inscrit parfaitement dans l’esprit du Musée du quai Branly.

Incroyable ! Une création magnifique qui vous habitera longtemps.

INFORMATION

Le Lièvre Blanc d’lnaba et des Navajos est joué jusqu’au 19 juin 2016 au Théâtre Claude Lévi-Strauss (37 Quai Branly, 75007 Paris).

  • samedi 11 juin 2016 à 20:00
  • dimanche 12 juin 2016 à 17:00
  • mardi 14 juin 2016 à 20:00
  • mercredi 15 juin 2016 à 20:00
  • jeudi 16 juin 2016 à 20:00
  • vendredi 17 juin 2016 à 20:00
  • samedi 18 juin 2016 à 20:00
  • dimanche 19 juin 2016 à 17:00

Réservation par téléphone au 01 56 61 71 72, du lundi au vendredi, de 9 h 30 à 17.

- RÉSERVATION FNAC
- RÉSERVATION RÉSEAU FRANCE BILLET
- SITE OFFICIEL

SYNOPSIS

Dix ans après avoir inauguré le Théâtre Claude Lévi-Strauss avec une interprétation épique et envoûtante du Mahabharata, le metteur en scène japonais Satoshi Miyagi est invité à concevoir un spectacle pour célébrer l’anniversaire du musée du quai Branly.

Shizuoka Performing Arts Center est une compagnie japonaise de théâtre contemporain, installée au pied du mont Fuji, dirigée par Satoshi Miyagi. Son travail de mise en scène, inspiré du kabuki, est basé sur la dissociation du logos et du pathos, de la parole et du corps. Pour ses créations, la compagnie propose une œuvre totale en réalisant de somptueux costumes et masques en papier japonais (dans la tradition de l’époque Heian du 9e au 12e siècle), et en concevant la musique du spectacle avec quarante percussions de tous horizons (gamelan, djembé…).

DISTRIBUTION

  • Conception et mise en scène : MIYAGI Satoshi
  • Texte : Ecriture collective de KUBOTA Azumi et la troupe
  • Musique : TANAKAWA Hiroko
  • Scénographie : KIZ Junpei
  • Création lumière : OSAKO Koji
  • Création costumes et masques : TAKAHASHI Kayo
  • Création son : KATO Hisanao
  • Avec : AKAMATSU Naomi, ABE Kazunori, ISHII Moemi,OUCHI Yoneji, OHTAKA Kouichi, KATO Yukio, SAKAKIBARA Yuumi, SAKURAUCHI Yu, SATO Yuzu, SUZUKI Mariko, DAIDOMUMON Yuya, TAKEISHI Morimasa, TATENO Momoyo, TAMOTSU Kana, TERAUCHI Ayako, NOGUCHI Shunsuke, HONDA Maki, MAKIYAMA Yudai, Micari, MISHIMA Keita, MORIYAMA Fuyuko, YAMAMOTO Miyuki, YOKOYAMA Hisashi, YOSHIUE Soichiro, YOSHIMI Ryo, WATANABE Takahiko
  • Accessoires : FUKASAWA Eri
  • Assistance accessoires : SATO Yosuke, MIWA Kaori, WATANABE Hiroki
  • Lumière : KAMIYA Reina
  • Son : GODA Kayo, HARADA Shinobu
  • Costume : KOMAI Yumiko
  • Assistance costume : OOKA Mai, SEI Chigusa, TAKAHASHI Kayako, KAWAI Reiko
  • Coiffure et maquillage : KAJITA Kyoko
  • Régie plateau : MURAMATSU Atsushi
  • Assistance régie plateau : YAMADA Takahiro, SATO Yosuke, YOKOTA Takao
  • Traduction des documents sur les Navajos pour la troupe japonaise : SATO Kiyoshi
  • Dramaturgie : YOKOYAMA Yoshiji
  • Assistance mise en scène : NAKANO Masaki
  • Interprétariat : HIRANO Akihito
  • Supervision technique : HORIUCHI Mahito
  • Opération surtitres : OISHI Takako
  • Traduction surtitres : Corinne ATLAN
  • Administration : OISHI Takako, TANJI Haru, NAKAMURA Yuki
  • Durée : 1h45
  • Public : à partir de 8 ans
TARIFS

  • Plein : 20 euros
  • Réduit : 15 euros
À PROPOS DU SPECTACLE

À partir du mythe du lièvre blanc relaté dans le Kojiki - recueil des mythes de genèse du Japon écrit au VIIIème siècle -, et des correspondances relevées par Claude Lévi-Strauss entre ces épisodes et des mythes amérindiens, Satoshi Miyagi crée un spectacle sur mesure pour le plateau du théâtre du musée.

Les 26 comédiens et musiciens de la troupe achèveront la création au cours d’une résidence au musée qui précédera 10 représentations exceptionnelles. Dans L’Autre face de la lune, son écrit posthume sur le Japon, Claude Lévi-Strauss établit des correspondances entre certains mythes d’Asie et des cultures amérindiennes.

En mettant en valeur leurs similitudes et leurs écarts, il fait de ces mythes parallèles les émanations d’un réservoir commun qui aurait circulé de l’Indonésie à l’Alaska à l’époque des grandes glaciations, alors que la majorité des îles étaient reliées à la terre ferme et que le détroit de Béring joignant l’Asie à l’Amérique était en grande partie émergé. Il rapproche notamment l’histoire du lièvre blanc d’Inaba de versions amérindiennes d’un épisode mythique, comparable par les figures du beau-père maléfique et du passeur :
« Tout se passe comme si un système mythologique peut-être originaire de l’Asie continentale et dont il faudrait rechercher les traces était passé d’abord au Japon, ensuite en Amérique »

Afin d’apporter sa réponse à l’hypothèse de Lévi-Strauss, toute la troupe du Shizuoka Performing Arts Center s’est plongée dans la lecture de cet ouvrage. Elle s’est imprégnée de sa pensée avant de se livrer à un exercice d’écriture collective, inédit pour Satoshi Miyagi et ses acteurs. Ils en ont avant tout retenu le refus de hiérarchiser les cultures, de distinguer civilisation et non-civilisation, et en ont tiré la grande gageure du projet : donner à voir les transformations du mythe, les voyages de la légende d’un continent à l’autre.

Pour cela, il faudra retrouver la richesse et la vie qui étaient celles de ces contes millénaires quand ils n’étaient que des récits transmis oralement, avant d’être figés dans la forme écrite qui leur a été donnée un jour. Voici la méthode proposée par Satoshi Miyagi : mettre en œuvre l’esprit démocratique du théâtre à ses débuts – lorsque la communauté villageoise était la troupe -, rechercher ce qu’il y a d’universel dans les légendes portées par deux cultures qui ne se connaissent pas, faire surgir les images épiques, donner le dernier mot à l’imagination théâtrale.


Les illustrations des articles sont Copyright © de leurs ayants droits. Tous droits réservés.



 Charte des commentaires 


Goldorak XperienZ : La soirée culte le 18 avril au Grand (...)
[Spectacle] Les Souliers Rouges : La critique
[Concert] One Night Of Queen : La critique
[Spectacle] Les Folies Gruss : La critique des 50 ans de la (...)
[Spectacle] Stomp : La critique
Naked Gun : Paramount se paye Pamela Anderson pour son reboot (...)
Jurassic World : Jonathan Bailey pour le film de Gareth (...)
Stakehorse : Justin Lin pour un projet policier pour (...)
Cowboy Bebop : La critique du Jeu de Rôle
Jeux Vidéos - Bandes Annonces : 18 avril 2024
Deadpool & Wolverine : Un buddy-movie plutôt qu’un (...)
Star Trek - Discovery : Préparez-vous pour un long final
Swamp Thing : Warner Bros. avait sous-estimé la série DC (...)
La Fièvre : Une grosse annonce après le final (SPOILER)
Doctor Who : Ce sera finalement un fauteuil pour deux en (...)