Japan Expo - Shigeru Miyamoto : De Super Mario à Super Mario Maker, 30 ans de création

Date : 11 / 07 / 2015 à 10h08

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Shigeru Miyamoto, créateur entre autre de Mario et de Zelda a donné une masterclass exceptionnelle lors de la Japan Expo 2015. Il a été rejoint sur scène par Takashi Tezuka avec qui il travaille sur les jeux Nintendo depuis trente ans. Ils sont revenus sur l’aventure Super Mario et nous ont présenté le nouvel opus Super Mario Maker.

Lors de l’arrivée de son ami, M. Miyamoto l’a présenté puis s’en est suivie une série de questions aux deux protagonistes.

S. Miyamoto : Cela fait plus de trente ans que l’on travaille ensemble. C’est le premier designer que j’ai embauché. A l’époque, il était un peu plus Luigi au niveau de la silhouette (rires).
Quand je l’ai embauché, on a directement travaillé ensemble sur Super Mario puis Takashi Tezuka est passé directeur sur Super Mario. Il a continué sur Super Mario World. Il est ensuite devenu producteur. Il a entre autre travaillé sur la série des Yoshis. Cela fait trente ans que nous travaillons ensemble et que nous prenons quasiment tous nos repas du midi et du soir ensemble.

Japan Expo :Pouvez vous nous parler de l’entretien d’embauche de Takashi Tezuka ?

S. Miyamoto : Quand j’ai commencé à faire passer les entretiens, je voulais un nouveau designer pour m’épauler. Énormément de gens disaient « je veux travailler chez Nintendo, c’est super ! ». Lui pas du tout. Il a dit « je pourrai travailler pour Nintendo mais je pourrai faire des fringues pour enfants ça ne me dérangerait pas ».
Quand je fais passer des entretiens, pour voir la créativité des gens, je leur fais dessiner des yonkoma : des petits mangas en quatre cases. Je leur donne trente minutes et je regarde un peu ce qu’ils vont dessiner. Sur une structure normale de manga comme celui là, il y a le démarrage, le propos et la chute. Et lui a juste fait un monsieur avec une barbe qui pousse. Je lui ai demande ce qu’il allait se passer. La barbe pousse, il ne se passe rien. Je me suis dit « c’est drôle que ce ne soit pas drôle ça doit être quelqu’un d’amusant » et je l’ai embauché.

Japan expo(Question à T.Tezuka) : vous êtes l’invité de Shigeru Miyamoto en tant que producteur de Super Mario Maker, pouvez-vous nous expliquer comment est né ce jeu ?

T. Tezuka : Dans la division que je dirige, il y a une petite partie de l’équipe qui est là pour faire des outils de développement, ce sont des gens très précieux. Ils ont commencé par créer un outil qui nous permettrait de développer plus facilement le prochain Super Mario.
Ce sont des gens qui créent des outils mais ce ne sont pas des créateurs de jeux vidéo, cependant en testant leur outil de fabrication de niveaux de Mario, ils se sont beaucoup amusés et ils sont venus me demander si l’on ne pouvait pas commercialiser directement cet outil. J’y ai réfléchi. Sur le moment je n’ai as eu le déclic qui me faisait valider le projet. Mais je m’étais déjà interrogé sur le fait d’utiliser le gamepad de la Wii U dans un projet style Mario Paint. Mario Paint est un jouet de luxe où les gens peuvent mettre toute leur imagination. J’ai pensé que peut être qu’en utilisant cet outil, l’inventivité allait s’envoler et que les joueurs pourront prendre beaucoup de plaisirs. J’ai donc commencé à penser à la commercialisation. Le jeu permet aux gens de faire des choses pas possibles dans un Mario comme empiler des ennemis ou leur mettre des ailes même s’ils ne sont pas censés voler. Nous avons fait en sorte que l’imagination puisse fonctionner à plein régime
Il est possible de faire énormément de choses sur Super Mario Maker, j’espère que vous allez essayer et nous en faire profiter.

Japan Expo : M Tezuka pouvez vous nous donner des astuces pour créer de niveaux dans Super Mario Maker ?

T. Tezuka : Cela dépend de la personnalité de chacun c’est un bel outil de fabrication.Pour commencer, il faut se faire une idée du genre de chose que l’on veut représenter. Pour faire un bon niveau il faut partir d’une idée et la complexifier dans le sens qu’elle soit malgré tout réalisable.

Tezuka et Miyamoto ont créé deux niveaux spécialement pour la masterclass de la Japan Expo. Le thème du premier niveau est la ville de Kyoto et un temple d’inspiration japonaise. Ils jouent puis rajoutent des éléments avec l’aide du public et arrivent ainsi à un niveau si dur qu’on ne peut pas y jouer.
T. Tezuka continue d’expliquer le jeu :"Avec le petit menu déroulant qui est à gauche on peut changer de style graphique, on peut passer de Super Mario Bros à Super Mario Bros 3, on peut se retrouver sur SuperNintendo autant que sur Wii U. Le changement ne fait pas varier que le design mais aussi le gameplay propre à chaque épisode. Avec un même niveau, on peut changer d’endroit, par exemple se mettre sous l’eau
Des ombres de Mario restent sur l’écran, elles sont là pour montrer l’amplitude des mouvements du personnage et aider le joueur au développement à placer les plates-formes à des endroits stratégiques. On sait alors où placer les éléments de manière pertinente, on peut alors fabriquer des niveaux avec des indices pour aider les joueurs "

Les deux maîtres de Nintendo nous montrent ensuite une autre surprise un niveau ayant pour thème Paris avec l’Arc de triomphe, le Sacré Cœur ou encore la Tour Eiffel.

Puis c’est au tour des organisateurs de la Japan Expo de faire une surprise avec un niveau mitonné par Michel Ancel (le créateur de Rayman) et inspiré de Pacman.
Après que les deux prestigieux invités aient pris les manettes, la discussion reprend.

T. Tezuka :On a mis beaucoup d’effort dans la création de ce jeu. Nous savons que les gens vont se faire un plaisir de créer des niveaux mais il y a autre chose où j’ai mis beaucoup d’énergie. J’ai réalisé un livre exprès pour Super Mario Maker.
Il y a deux raisons à la réalisation de ce livre : le but du jeu est que les gens puissent construire leur niveau mais tout le monde n’est pas familier de la création. J’ai pensé qu’un livre serait bien pour faciliter l’inspiration. Dans ce livre, il y aura différents exemples et en dessous, des numéros : en rentrant ces numéros, vous pourrez voir des petits films associés aux pages du livre. Je voulais aussi créer quelque chose qui reste longtemps dans les cœurs et les mémoires des joueurs. J’aimerai qu’ils jouent à fond au jeu avec l’aide de ce livre et peut être même qu’ils s’y perdent. Le livre sera fourni avec le jeu
Vous pouvez avoir des idées mais aussi des réalisations qui font penser à un livre d’images. Et tout réaliser avec Super Mario Maker. J’ai voulu intégrer des pages amusantes. Certaines expliquent tous les mouvements de tous les ennemis. Nous avons utilisé des papiers millimétrés qui nous aidaient il y a trente ans à créer les originaux de Mario. A l’époque, on dessinait les niveaux à la main sur du papier millimétré. On demandait ensuite au programmeur de les réaliser. Quand on créait un niveau, il fallait attendre une journée pour pouvoir le tester, le temps qu’il soit développé.
Il y a aussi des numéros de vidéo cachés un petit peu partout dans le livre, à vous de les découvrir

Puis, T. Tezuka a lancé un appel à tous les fans de Mario à l’occasion des trente ans.

T. Tezuka :Nous invitons les gens à nous envoyer des petites vidéos amusantes en rapport avec les trente ans de Super Mario. On a reçu pas mal de vidéo toujours très amusantes, en tant que créateur ça fait toujours plaisir. Je vous encourage à en envoyer si vous avez envie de les réaliser : https://www.nintendo.fr/games/oms/mario30/index.html

La Masterclass s’est ensuite poursuivie avec une séances de questions-réponses twitter.

Question Twitter : Pourquoi des tortues en guise d’ennemis ?

S. Miyamoto : On voulait juste créer des jeux amusants, à l’époque de Mario Bros le but était de renverser des ennemis par en dessous et quand on pense à un animal que ça embête, on pense à la tortue. Sur Super Mario, j’avais proposé qu’on réutilise les tortues. A l’époque on a eu de grandes discussions en interne, vous le savez tous quand on tape dans une carapace, elle part, elle sort de l’écran et si elle rebondit elle vous revient dans la figure. A l’époque à Nintendo, il y avait la moitié du staff qui trouvait cela génial et l’autre moitié pensait que c’était une erreur de gameplay. On a bien fait de la garder. On a fait en sorte que si l’obstacle est trop loin, en dehors de l’écran, elles disparaissent. A ce moment là on s’est dit que tant qu’à aller dans les tortues autant y aller à fond : mettons des ailes aux tortues ! C’est comme ça que Bowser est né , je me suis dit "à la fin faut mettre une tortue énorme" et nous aussi, 30 ans plus tard, on est là grâce aux tortues.

Question Twitter : Est-ce qu’il vous arrive d’être nostalgique des débuts du jeu vidéo ?

S. Miyamoto : A l’époque nos équipes étaient vraiment très réduites et nos ambitions l’étaient aussi. Aujourd’hui nos équipes sont beaucoup plus grosses et nous faisons des choses de plus en plus complexes. Grâce à ces grandes équipes, on a pu avoir une équipe dédiée au développement d’outil, cela a permis de créer Super Mario Maker. C’est aussi bien aujourd’hui.
Avant on faisait un jeu à 5 ou 6 et ça nous prenait 6 mois maximum. Le concept même des games designers n’existait pas, tout le monde faisait un peu de tout. Aujourd’hui, les postes sont très répartis, c’est plus facile et ça me fait plaisir d’avoir des games designer.

La sortie du jeu Super Mario Maker est prévue pour le 11 septembre soit deux jours avant les 30 ans de Super Mario, le 13 septembre.