Une nouvelle amie : La rencontre avec François Ozon et Romain Duris

Date : 11 / 03 / 2015 à 09h20
Sources :

Unification


A l’occasion de la sortie d’ Une nouvelle amie en DVD et Blu-ray le 11 mars 2015, venez découvrir la rencontre que nous avons eue lors de la projection du film à l’issue de laquelle nous avons pu rencontrer le réalisateur François Ozon et l’acteur Romain Duris, qui nous ont parlé du film et ont répondu aux questions du public.

Vous pouvez retrouver la retranscription de la rencontre ci-dessous.

Attention ! Les questions-réponses comportent de nombreux spoilers, notamment concernant la fin du film.

Comment passe-t-on d’une nouvelle à un long métrage ?
François Ozon : j’ai lu la nouvelle de Ruth Rendell il y a environ 20 ans. J’en avais alors écrit un court-métrage de 15 pages. Mais je n’avais pas à l’époque trouvé d’acteur et de financement pour le réaliser.
Quand j’ai réalisé le film, je ne voulais pas terminer sur un meurtre mais sur 2 personnes qui vivent leur vie ensemble.
L’autre grande différence entre le film et la nouvelle est le deuil. J’ai utilisé cette thématique pour comprendre comment les personnages du veuf et de la meilleure amie se transforment.

Comment avez-vous préparé votre rôle ?
Romain Duris : je me suis préparé physiquement. J’ai marché avec des talons pour m’y habituer et ne pas faire sentir au public que je faisais des efforts en marchant. J’ai aussi fait un travail avec une danseuse sur la concentration. Elle m’a aidé à laisser parler la femme en moi. Jamais je n’ai eu peur de perdre confiance en moi en interprétant ce rôle surtout après avoir trouvé le look de mon personnage. Les hommes qui se travestissent ne sont pas forcément conscients de la réalité et ils en font parfois trop.

Avez-vous rencontré des travestis pour vous imprégner du rôle ?
Romain Duris : j’ai vu des documentaires sur les cross-dresser. Je n’ai pas eu envie de rencontrer des acteurs qui ont joué des rôles similaires ou des travestis. Je ne suis pas allé sur le terrain pour me documenter. Je voulais trouver ma place dans le rôle par moi-même.

Pourquoi avoir choisi le thème d’un homme qui se travestit ?
François Ozon : je voulais parler du choix du genre et du sort qui attend ceux qui sortent de la place qu’on leur a donnée. Le travestissement est une émancipation.

Comment avez-vous préparé cette scène où vous apparaissez presque nu en sous-vêtement de femme ?
Romain Duris : j’étais déjà dans le personnage car cette scène a été réalisée en fin de tournage. Je n’ai donc pas eu d’appréhension lorsque la scène a eu lieu. Mon plus gros problème à ce moment-là était comment entreprendre Claire (interprétée par Anaïs Demoustier) : est-ce que je devais embrasser de manière virile Anaïs ou je devais le faire avec délicatesse ? Finalement cela s’est passé de manière assez naturelle et spontanée. Quand j’embrasse Anaïs, il y a une perte de repère entre homme et femme. En fait Virginia (le rôle de Romain Duris) sait ce qu’il est.

Quel est le personnage le plus important : Claire ou David/Virginia ?
François Ozon : Claire. Je trouve le trajet que le personnage suit plus ambigu. Il y a cet affrontement entre attraction et répulsion. Elle a du mal à accepter l’idée qu’elle aime Virginia. Cela lui permet aussi de s’assurer de sa féminité. Elle s’est développée à l’ombre de son amie et Virginia l’aide à en sortir.

Comment s’est passé le tournage ?
François Ozon : nous avons tourné 15 jours au Canada ce qui nous a apporté une certaine distance. La maison que nous avons choisie pour le tournage a une architecture américaine dans une banlieue très lisse. L’automne du tournage, il y a eu un été indien avec une lumière très belle.

David est fasciné par les femmes ? Est-ce que vous êtes aussi fasciné par les femmes ?
François Ozon : l’homme est plus dans l’action, la femme plus dans l’intériorité. Claire est souvent spectatrice et ne dit pas grand-chose.

N’avez-vous pas eu l’idée de faire la même histoire avec des rôles inversés, la femme se travestissant en homme ?
François Ozon : un homme qui s’habille en femme est l’un des derniers tabous : j’ai envie de faire tout ce qu’on m’a interdit en tant qu’homme.

Vous avez parlé du film Waterloo Bridge dont vous passez un extrait dans Une nouvelle amie. Quelles sont les similitudes entre les deux films ?
François Ozon : il s’agit d’un couple qui se sépare. Mon film tend plus vers le conte de fées.

Avez-vous aussi fait ce film pour lutter contre la haine à laquelle on est confronté ces derniers temps ?
François Ozon : j’ai écrit le scénario pendant la manif pour tous. Je me suis posé la question de comment raconter l’histoire, comment être doux. Je voulais faire adhérer le spectateur au scénario. C’était un désir complexe. Je voulais montrer une différente sorte de famille.

Qu’en est-il du personnage de Raphaël Personnaz qui incarne le mari de Claire ?
François Ozon : ce personnage est important. Pourquoi Claire ne lui dit rien de ce qui se passe ? Elle garde le secret car le désir est déjà là. Raphaël amène de la finesse dans son personnage un peu pataud.
A la fin du film Claire est enceinte. Mais qui est le père ? Beaucoup de personnes pensent que Raphaël est le père, mais nous avons joué cette fin avec Virginia à l’esprit.

Qu’est-ce qui vous a ému en Virginia ?
Romain Duris : son combat, l’acceptation de sa féminité qui est une sorte de renaissance. J’avais envie d’apporter de l’émotion, de donner du cœur au personnage.

François Ozon : la scène de la boîte de nuit n’était pas censée être émouvante. Il y avait un travesti, un garçon assez beau sur scène. Les acteurs étaient très émus.
Le cœur du film c’est d’être enfin accepté.

Vous êtes actuellement en promotion de votre film. Est-ce qu’il n’y a pas un contexte difficile en ce moment concernant les questions de genre ?
François Ozon : nous avons fait une tournée en province très réussie pour la promotion du film. Tout s’est très bien passé. C’est un film sur la liberté, l’émancipation. Ce sont des thèmes qui passent très bien en France. Mais le film est devenu à son insu politique.

Comment s’est fait le choix de Romain Duris ?
François Ozon : J’ai vu plusieurs acteurs, avec lesquels j’ai fait des essais de maquillage et de perruques, pour voir à quoi ils ressemblaient en femme, si cela fonctionnait. C’était un moyen de tester leur désir de féminité. Romain s’est imposé, non pas parce qu’il était « la plus belle femme », mais parce qu’il émanait de lui une grande joie à se travestir. Il y avait une évidence, une incarnation, un plaisir fétichiste d’enfiler les bas, les robes, sans ironie ou distance. Son désir pour le rôle de David/Virginia était tellement fort que le choisir est devenu une évidence pour moi.

Pourquoi vouloir jouer une femme ?
Romain Duris : la transformation physique est agréable à faire. Cela m’a aussi aidé à être mince car j’ai dû perdre du poids pour le rôle. En effet, c’est une demande que François Ozon fait à toutes ses actrices avant de tourner avec. Je me suis lâché dans mon interprétation en jouant un homme avec une sensibilité féminine.

Portez-vous actuellement des sous-vêtements de femmes ?
Romain Duris : non car le film est terminé, mais Virginia me manque un peu.

Est-ce que votre travail autour de Virginia vous a appris quelque chose ?
Romain Duris : que le risque, le doute est important. Que quelque part cela fonctionne. Quand on risque des choses, cela peut marcher. Peut-être que Virginia m’aide à composer plus. J’ai peur de m’ennuyer.

Comment était votre relation avec Anaïs Demoustier ?
Romain Duris : elle est venue très tôt.
François Ozon : elle était un peu jalouse des robes de Virginia. Son personnage est plus compliqué qu’il ne donne l’impression. Anaïs a compris la valeur du personnage. Elle a tout de suite dit « c’est moi ! ».
Romain Duris : dans le partage des scènes, elle était très présente.
François Ozon : elle a interprété un rôle compliqué car son personnage est une spectatrice. J’avais proposé ce rôle à une actrice célèbre à qui j’avais envoyé le script. Mais elle a trouvé le personnage peu intéressant et qu’il n’y avait rien à jouer dedans. Anaïs a démontré qu’il y avait tout à jouer dans ce rôle.

Quel était votre direction d’acteur concernant Anaïs ?
François Ozon : Anaïs, de spectatrice, devient une femme. Je suis fasciné par Anaïs dans ce rôle qui est presque documentaire.

Le personnage est très subversif. Avez-vous un intérêt pour la subversion ?
François Ozon : ce sont des personnages atypiques qui se cherchent qui rendent la situation subversive. C’est lié à complexité des personnages et leurs relations vis-à-vis du désir.

Etes-vous engagé dans la cause LGBT (lesbienne, gay, bi et transsexuel) ?
François Ozon : je suis allé à la manif anti-manif pour tous. Je ne suis pas engagé, mais mon film est une forme d’engagement.

Une nouvelle amie est un film intéressant sur un sujet d’actualité tout en étant intemporel : le genre. L’histoire est très agréable, magnifiquement servie par des acteurs qui habitent leurs personnages. Vous pouvez en retrouver la critique ICI.

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