Ghibli - Art Ludique Le Musée : Notre visite de l’exposition

Date : 03 / 10 / 2014 à 14h53
Sources :

Unification


Après les prestigieuses expositions Pixar, 25 ans d’animation et L’Art des Super-Héros Marvel, la nouvelle exposition de Art Ludique-Le Musée porte sur les Dessins du Studio Ghibli : les secrets du Layout pour comprendre l’animation de Takahata et Miyazaki.

L’exposition aura lieu du 4 octobre 2014 au 1er mars 2015 à Art Ludique – Le Musée.

Lors de notre arrivée dans les locaux du musée, nous avons eu droit à une visite privée et accompagnée de l’exposition, ce qui nous a permis d’obtenir quelques anecdotes dont nous vous faisons part ci-dessous :

L’exposition Ghibli porte sur le "layout" qui est un élément clé de l’animation. En effet on en trouve qu’1 ou 2 par séquence. Il s’agit d’un dessin unique qui détermine l’ensemble de la séquence à venir dans tous ses aspects. Le musée a eu la chance de pouvoir présenter 1.300 dessins originaux dont la plupart sont dessinés par Miyazaki lui-même. En effet, ce dernier fait les layouts de ses œuvres. Takahata lui ne dessine pas et laisse le soin des layouts de ses films à ses directeurs artistiques.

La première salle permet de se familiariser avec cette technique avant de voir les œuvres du studio Ghibli de 1982 à 2013 représentées chacune par un layout unique auquel on a ajouté Nausicaä de la vallée du vent qui est l’animé ayant permis de lancer le studio Ghibli. Le reste de l’exposition est consacré aux 30 années du Studio Ghibli et à tous ses films. Avec ces dessins exposés, Art Ludique voulait montrer qu’il y a de véritables artistes derrière les dessins animés du studio.

La direction du musée avait constaté lors de l’exposition Pixar que les enfants, même de 4-5 ans, venaient avec leurs parents. Les enfants reconnaissaient les œuvres et les parents avaient eux aussi une bonne connaissance des films Pixar car ce sont des animés que l’on va voir en famille. Il y a en plus un travail d’explication des parents sur les œuvres présentées qui rapproche les générations.

Takahata et Miyazaki ne viendront pas en France. Pour autant, c’est la première fois que l’exposition est présentée en Occident. Il s’agit d’une exposition exceptionnelle. Par exemple le musée Ghibli fait environ 80 m2 avec peu de dessins exposés parmi ceux que l’on voit dans notre exposition qui fait 1 200 m2.

INTERVIEW

C’est dans le cadre de sa nouvelle exposition que nous avons rencontré et interviewé Jean-Jacques Launier le président et co-fondateur d’Art Ludique – Le Musée dont vous pouvez trouver les échanges ci-dessous.

Le 21 juin 1995, un film du studio Ghibli, jusqu’alors inconnu, sortait sur les écrans français. Il s’agissait de Porco Rosso qui à l’époque avait été un électrochoc dans la perception des animés en France. En effet ces derniers étaient considérés comme réservés aux enfants. La France découvrait à l’occasion de la sortie du film de Miyazaki une œuvre visuelle riche et étonnante qui s’adressait à tout le monde. Est-ce à cette époque que vous avez découvert le studio Ghibli ou le connaissiez-vous précédemment ?

J’ai découvert le studio Ghibli avec Mœbius. Je regardais aussi Heidi mais à ce moment, c’était la série qui était connue et non pas Miyazaki. J’ai passé beaucoup de temps avec Mœbius et en 2004-2005, j’ai monté l’exposition Mœbius-Miyazaki à la Monnaie de Paris. Mœbius a d’ailleurs appelé sa fille Nausicaä en hommage à Miyazaki.

Vous orientez votre nouvelle exposition sur le Layout. Cette technique n’est pas forcément connue du grand public. Avez-vous pensé votre exposition comme un apprentissage des dessous de l’animation en même temps que la découverte de l’œuvre d’un des studios d’animation le plus célèbre du monde ?

Le musée Art Ludique a une dimension artistique majeure. Il porte sur l’art derrière l’art. Par exemple pour l’exposition Pixar nous avions l’idée de montrer que les animés n’étaient pas faits par des ordinateurs, mais qu’il y avait des vrais artistes derrière les images, des dessinateurs, peintres, sculpteurs. Cette exposition a permis de montrer de grands artistes.
De telles expositions permettent de montrer la perspective au-delà de la théorisation. Le musée permet d’ouvrir la porte au grand public sur les immenses artistes se trouvant derrière les animés.
Si on prend la bande dessinée, on trouve derrière des gens qui ont influencé les œuvres qu’on connait actuellement.
Les artistes de divertissement créent des œuvres qui deviennent au fil du temps les plus marquantes auprès du public comme les œuvres d’une grande poésie du studio Ghibli. Des œuvres plus marquantes encore que ce que l’on considère comme des vraies œuvres d’art, traditionnellement la peinture et la sculpture.

En ce qui concerne l’exposition Ghibli, ce sont eux qui ont créé cette exposition autour du layout. L’exposition a tourné en Asie, mais c’est la première fois qu’elle se trouve en Occident. Et ça risque d’être la seule fois qu’elle sera en Europe.
Nous avions une bonne connaissance de Miyazaki ce qui a été très facilitant pour faire venir l’exposition à Paris.
Nous avons été voir l’exposition en Asie et nous avons essayé au musée de mettre en place une adaptation de l’exposition au plus proche de l’idée de ses créateurs.
Nous avons ainsi voulu que l’exposition soit ludo-éducative. Nous proposons compris dans le billet d’entrée un audioguide qui permet d’avoir des informations sur un certain nombre d’œuvres exposées. Dans chaque salle, l’audioguide permet aussi d’écouter les musiques des films du studio Ghibli dont les œuvres sont présentées (les salles sont dédiées à une ou plusieurs œuvres du studio).

Nous avons aussi en première mondiale les layouts de Souvenirs de Marnie (Omoide no Marnie) qui est sorti le 19 juillet au Japon et sortira le 14 janvier en France.

Une exposition Ghibli est une magnifique idée pour tous les amateurs de belle animation. Mais combien de temps vous a-t-il fallu pour réussir à monter un événement de cette ampleur ?

Un an et demi. Nous avons reçu l’accord de principe des collaborateurs du studio Ghibli qui étaient de passage à Paris. Nous avions aussi leur confiance car ils nous connaissaient et connaissaient notre travail. Et pour les japonais, la confiance, c’est vraiment très important !
Pour cette exposition, nous avons refait notre architecture intérieure car nous voulions un parcours scénographique.

Est-il plus facile ou difficile de travailler avec des japonais qu’avec des américains ?

Quand nous avions fait l’exposition Marvel, c’était plus facile pour nous car nous avions plus de liberté. Nous avions des contacts avec le studio Ghibli et nous sommes le premier musée consacré à l’art de "l’entertainment" (divertissement).
L’exposition Ghibli demande une rigueur extrême avec une conservation des œuvres compliquée à mettre en place mais le soutien des japonais nous a permis de réussir ensemble ce projet.

Nous avons d’ailleurs recréé les espaces intérieurs. Le musée a une structure en dur non modulable, aussi nous avons construit de véritables murs afin de réorganiser l’espace. Ce qui fait que nous nous perdons parfois en son cœur vu que nous n’avons pas l’habitude de sa nouvelle structure. Nous réfléchissons d’ailleurs sur le fait de conserver nos salles telles quelles à l’issue de l’exposition.

Le Studio Ghibli a depuis 2001 un musée qui lui est dédié à Mitaka dans la banlieue de Tokyo au Japon. L’avez-vous visité lors de la préparation de votre exposition ?

Je connais bien le musée Ghibli. C’est vraiment un endroit magique et l’un de mes musées préféré dans le monde.
On y trouve peu des dessins présentés dans notre exposition car la plupart d’entre eux se trouvent dans les archives du studio Ghibli. C’est une collection à part. La connaissance du musée a été d’une grande aide pour la préparation et l’adaptation de notre exposition.

Comment avez-vous réussi à obtenir 1.300 dessins originaux pour votre exposition ?

L’exposition était déjà créée et celle qu’on trouve dans nos locaux est plus ou moins similaire bien qu’on ait dû adapter notre espace pour la mettre au mieux en valeur.
Je connais Miyazaki depuis 12 ans et on s’est vu quelques fois ces dernières années. Il sait qui on est et cela depuis de nombreuses années.
Notre galerie Arludik a mis en place l’exposition Ponyo sur la falaise et a aidé à promouvoir La colline aux coquelicots.
La première exposition du musée Art Ludique était consacrée à Pixar. Miyazaki était bien conscient du degré d’exigence de Pixar. Cela les a rassurés. Nous avons aussi un message et une programmation artistique qui plaisent.
Notre musée a beaucoup investi pour une protection parfaite des œuvres qu’il présente. Nous les protégeons de l’humidité et de l’éclairage avec un contrôle des salles heure par heure.

Nous avons remarqué dans votre exposition des layouts de séries télévisées. Comment avez-vous réussi à les obtenir ?

C’est exceptionnel d’avoir réussi à obtenir des layouts de séries télévisées créées il y a plus de 30 ans. Nous avons fait appel à des collectionneurs pour cette partie de l’exposition.

Que souhaitez-vous apporter au public français à travers cette exposition ?

Nous voulons le retour du figuratif/narratif dans l’art contemporain. Les familles viennent avec leurs enfants qui sont fascinés. Ils trouvent du plaisir à parler avec leurs parents des œuvres. C’est aussi très valorisant pour eux de voir que ce qu’ils aiment, c’est aussi de l’art. On est loin des réflexions sur la BD qui n’est pas de l’art et n’apporte rien à la personne qui en lit. Cette exposition, c’est aussi un hommage à la bande dessinée et aux autres supports dépréciés afin de leur donner une dimension artistique.

En plus d’être le président et co-fondateur d’Art Ludique – Le Musée, vous êtes aussi président de la commission du Fonds d’aide au jeu vidéo du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Pouvez-vous nous dire un mot en ce qui concerne les jeux vidéo à l’heure actuelle ?

Le jeu vidéo, c’est un art total comme le dit Pierre Cornette de Saint Cyr. D’ailleurs prochainement dans notre galerie Arludik, nous aurons une exposition consacrée aux jeux vidéo. Elle portera sur le jeux vidéo Assassin’s creed (exposition du 30 octobre au 15 novembre 2014). Les musées peuvent faire de grandes choses autour des jeux vidéo.
Les plus grands artistes à venir viennent des jeux vidéo. En France, nous avons beaucoup de créatifs.
En tant que président de la commission, j’aimerais faire se rencontrer les gens issus de la bande dessinées et ceux du jeu vidéo. En effet dans les jeux vidéo, les professionnels ont beaucoup de talent dont la pertinence du gameplay. Tous gagneraient à se rencontrer. Mais en général les auteurs de BD sont des solitaires qui ne croisent pas leurs homologues des jeux vidéo. Ils ne fréquentent pas les mêmes lieux et festivals. Mais ils auraient toutes les raisons de se rencontrer.
C’est passionnant de voir ce que les artistes peuvent devenir et comment ils peuvent s’épanouir.

Votre nouvelle exposition s’étend du 4 octobre au 1er mars 2015. Êtes-vous déjà en train de travailler sur la prochaine exposition du musée ?

Je suis en train de travailler sur les 6 prochaines expositions du musée ! La bande dessinée, l’animation, les jeux vidéo sont des thématiques que je compte aborder. Je voudrais mettre en place des expositions portant sur des médias différents et venant de continents différents.

NOTRE AVIS

L’exposition est très belle et superbement mise en valeur. On progresse à travers le temps en passant en revue les œuvres du studio Ghibli. Chaque salle nous propose des écrans qui permettent de projeter les séquences animées, directement extraites des films, permettant d’illustrer un layout mis en valeur à côté de cet écran. Le rendu est saisissant et l’impact pédagogique impressionnant.
On peut aussi s’amuser à repérer les ombres, ou se perdre dans les miroirs comme Chihiro.

Les layouts dont les commentaires ont été traduits nous apprennent une multitude de choses et nous font entrer dans le monde de l’animation d’une manière très originale.

Les salles sont consacrées à une ou plusieurs œuvres du studio Ghibli, comme la magnifique salle réservée à Chihiro.

La salle réservée aux séries sur lesquelles Miyazaki et Takahata ont travaillé est exceptionnelle et nous permet de découvrir des dessins qu’on pourrait croire disparus depuis longtemps. On y trouve ainsi les layouts de Heidi qui est le premier travail commun entre les deux cofondateurs du studio Ghibli. La série a été réalisée par Isao Takahata alors que le layout était assuré par Hayao Miyazaki.

A la fin de l’exposition, n’hésitez pas à prendre une photo en compagnie de Chihiro. La technique de transformation de votre photo en crayonné et son intégration dans le décor est bluffant. On peut même se l’envoyer par mail. Nul doute que cette originalité rencontre un énorme succès.

A la fin de la visite de l’exposition, on arrive dans la boutique du musée Art Ludique et cela vaut vraiment la peine de s’y arrêter. On peut y trouver des articles originaux comme des porte-clés craquants ou un arrosoir vraiment sympathique.

Tout amateur du studio Ghibli ne pourra pas quitter le lieu sans repartir avec le catalogue de l’exposition. Ce livre magnifique qui reprend presque intégralement les œuvres présentées dans l’exposition est une véritable œuvre d’art en lui-même. 476 pages en couleurs mettant en valeur les centaines de layouts correspondant à 30 ans de studio Ghibli, le tout pour 34 euros. J’avoue avoir dû regarder deux fois l’étiquette du prix pour y croire. C’est vraiment un livre superbe sur lequel on peut passer de nombreuses heures à s’extasier devant le génie de ces artistes qui nous font rêver avec des dessins animés somptueux, forts et poétiques. Un livre d’art à placer à côté d’autre livres consacrés à d’illustres peintres et artistes.

La restructuration des salles intérieures pour mettre en valeur l’exposition élève d’une certaine façon le musée comme une œuvre d’art à part entière car c’est l’espace lui-même qui apporte la touche finale à des salles parfaitement agencées.

Je le dis, et l’écris, haut et fort, longue vie au studio Ghibli et tous mes remerciements au Musée Art Ludique de nous offrir une exposition aussi magnifique et enchanteresse.

Je tiens aussi à remercier Jean-Jacques Launier de l’interview fort intéressante et passionnée qu’il nous a donnée. L’homme est un véritable connaisseur et amoureux de l’art qu’il nous montre. L’esprit qu’il insuffle dans le monde de l’art contemporain devrait trouver des "copieurs" dans le monde entier lorsque d’autres musées consacrés aux arts ludiques ne manqueront pas de voir le jour ailleurs.

Bravo, bonne continuation et continuez de nous faire rêver tout en montrant à tous que l’art n’est pas que réservée à une élite refermée sur elle-même.

Tarif (comprenant la mise à disposition d’un audioguide pour chaque visiteur) :

  • Plein Tarif : 15,50 €
  • Tarif réduit : 12,50 € (étudiants, demandeurs d’emploi, Personnes en situation de handicap)
  • Enfants : 10 € (de 4 à 12 ans)
  • Groupes : 10 € (à partir de 20 personnes)
  • Groupes scolaires : 7,5 € (à partir de 20 personnes)

Lieu : Art Ludique – Le Musée, 34, quai d’Austerlitz 75013 Paris

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