Utopiales 2013 : Rencontre avec Jean-Claude Mézières

Date : 01 / 12 / 2013 à 13h00
Sources :

Unification France


Parmi les nombreux invités des Utopiales, Jean-Claude Mézières l’auteur de Valérian et Laureline était présent sur la scène centrale de l’Espace Shayol pour revenir sur Valérian et sa longue carrière de dessinateur. Le panel était animé par Georges Mérel.

GM : Jean-Claude, comment es tu venu à la science fiction ?
Il y a d’abord le fait que je suis tombé dans la Bande-Dessinée très jeune. Mon frère aîné de sept ans faisait déjà des Bandes-dessinées pour son plaisir. Il faisait ses petits strips et il m’arrivait de dessiner la suite pour m’amuser en copiant ses dessins. Est venu ensuite le temps des revues de Bandes-Dessinées d’après guerre. Un des premiers auteurs qui m’ont particulièrement inspiré, c’est Uderzo qui signait Al Uderzo quand il dessinait dans le magazine OK où il faisait une histoire de Fantasy, de princesse et de dragon. Son graphisme était déjà très abouti alors qu’il devait avoir à peine 17 ou 18 ans quand j’en avais 11 ou 12. J’étais fasciné. J’ai ensuite eu la période Tintin, Spirou. La Science-fiction ne faisait pas partie du tout de la Bande-Dessinée. On trouvait du western, du polar, des héros militaires mais pas de SF. Il y avait cependant dans les années 50 un formidable courant autour des romans de science-fiction pour la jeunesse et mes copains Pierre Christin et Jean Giraud "Moebius" (on se connaissait depuis l’enfance) on s’échangeait les bouquins et en lisait énormément. La science-Fiction était un domaine très mal vu par les bibliothèques, les journalistes et les profs. Et donc quelques années plus tard, quand on a décidé de se lancer dans la BD, on a choisi la science-fiction puisqu’il n’y en avait pas dans le journal Pilote en 1965 quand on est arrivé. A l’époque, la première histoire de Valérian parue dans l’hebdomadaire Pilote était à raison de deux pages par semaines. Il n’était même pas prévu d’en faire des albums puisque le format était de 30 pages. À ce moment là, dans les séries de Pilote il n’y avait qu’Astérix qui paraissait en album et le succès n’était pas encore là. L’album n’était pas la norme en matière de Bande-Dessinée en France. On a fait une, deux, trois histoires et c’est à partir de la quatrième qu’on s’est dit « On va faire un album. » A partir de là, on a formaté l’histoire pour 44 pages.

Il y a déjà beaucoup de monde à Pilote quand vous arrivez et vous vous lancez dans la Science-fiction. Dans les BD de l’époque, on trouvait souvent un héros et son (ou ses) faire-valoir. Vous êtes venu avec deux personnages principaux. Est ce que le concept a été approuvé facilement par la rédaction de Pilote ?
Il n’y a eu aucune barrière à ça. A l’époque les rédacteurs en chef de Pilote qui étaient Goscinny et Charlier étaient aussi des créateurs. Au cours de la première histoire Valérian est sauvé d’une feuille magique dans un voyage au Moyen-Âge par Laureline (que je dessine toujours mieux que la tête de Valérian même après toutes ces années). J’ai découvert que d’une part, dessiner une nana c’était très chouette, et que par ailleurs il n’y avait pas d’héroïne similaire dans les autres séries. On avait les Castafiores, les princesses évanouies, les emmerdeuses, la maman du petit garçon ou la concierge. Tous les personnages féminins de la Bande-Dessinée française étaient comme ça. Quelques lecteurs nous ont écrit pour nous dire « C’est marrant vos histoires de science-fiction à la sauce spatio-temporelle avec une belle nana. » Laureline s’est tout de suite taillé une réputation. Moi, je faisais ce que je pouvais pour la dessiner correctement. C’est Pierre qui lui a donné de l’importance au fil des histoires. Elle était au second plan dans les premières histoires mais on s’est dit que c’était formidable d’avoir un personnage comme elle. C’est un électron libre qui n’a pas les même obligations que Valérian. Elle peut dire et faire tout ce qu’elle veut. On a pu ainsi les faire se confronter et avoir des différences d’opinion notamment sur le plan politique. L’un de leur premier clash c’était dans Bienvenue sur Alflolol qui est une histoire qu’on a fait en 1972 et c’était quelque chose d’écologique. Ça ne se faisait pas de raconter des histoires disant « À qui est la Terre ? Qui a le droit de la peupler ? » Laureline prend la défense des autochtones dépossédés tandis que Valérian est coincé par ses obligations bien qu’il soit dans le fond du même côté qu’elle. On n’était pas spécialement motivés par un quelconque esprit militant mais c’est vrai qu’à ce moment là nous avons produit l’une des premières BD écolos (ou du moins qui parlait de problèmes écologiques) dans un milieu qui était encore assez conservateur.

Comment choisissiez-vous avec Pierre dans quel contexte et époque devait se dérouler telle histoire ?
On se savait pas trop ce qu’on voulait faire. On ne voulait pas faire ce que les autres faisaient. Donc, primo, on a fait de la SF parce qu’il n’y en avait pas pas en ce temps là. Et secundo pour moi, dessinateur jamais très content de mon dessin, ça me permettait de varier un peu les genres. Au lieu d’un univers sédentaire et figé, à chaque nouvel album on créait une planète, des civilisations, et c’était assez formidable car chaque album pouvait relancer complètement la machine. Je n’avais plus envie de dessiner des châteaux forts tarabiscotés ? Alors on imagine l’O.N.U de l’Espace avec Point Central. À chaque fois, la richesse du scénario me permettait de créer ce qu’on ne trouvait pas dans d’autres BD.

Comment as tu fait évoluer ton style ?
J’ai toujours été d’une veine comico-réaliste. J’adorais évidemment les dessins de Franquin mais aussi les dessins de l’équipe de MAD Magazine aux États-Unis et à l’autre côté du spectre, je vouais une admiration absolue pour Jijé et ses westerns avec Jerry Spring avec la maîtrise des ombres en noir et blanc, la maîtrise du pinceau, je trouvais que c’était ce qui se faisait de mieux. Giraud, à l’époque était en train de tailler des croupières à Jijé mais il n’avait pas encore réussi. Jijé pouvait, avec une économie de moyens extraordinaire, montrer la poussière, le métal, les rochers etc... J’essayais donc de mélanger mes deux influences et c’est devenu le style "Mézières".

Valérian a été conçu pour une publication hebdomadaire. Était-ce un rythme de travail difficile à suivre avec les planches livrées à l’impression à la dernière minute comme le décrivait Cabu ?
Cabu et Gotlib ont raconté beaucoup de bêtises là dessus mais c’était globalement assez vrai. Quand on se mettait d’accord avec Goscinny pour dire « OK ! » Après lecture du synopsis, il nous donnait un peu d’avance (tous les dessinateurs veulent ça, histoire de ne pas se précipiter) mais c’était systématique : les dernières planches de l’album, c’était une course contre la montre. Il y avait deux pages à fournir chaque semaine, on finissait par perdre notre avance et on livrait nos planches le jeudi après-midi en courant comme des fous Rue du Louvre à Paris pour donner à la rédaction les deux pages qui devaient paraître la semaine suivante. Il y avait cette pression. Il fallait faire vite. Il fallait faire bien sans se prendre la tête. On n’avait pas le temps de jouer les artistes. Au bout d’un moment, il n’était plus question de faire des retouches, il fallait que ça parte dans l’après-midi. L’avantage et la chance qu’on avait à travailler pour un journal c’est qu’on était payé pour faire des progrès. Si ce que je faisais ne plaisait pas à tel lecteur, il tournait la page et il avait Astérix derrière ou Blueberry avant. C’était un confort extraordinaire d’avoir une œuvre au sein d’un magazine au lieu d’être lâchée directement en album devant le public comme c’est maintenant le cas.

La sortie de l’album à l’époque c’était un peu une récompense pour les auteurs.
Oui. Et il y avait aussi la possibilité de changer occasionnellement de partenaire. Je travaillais avec Christin et un jour Goscinny me donne un scénario pré-découpé et pré-dessiné par Fred qui n’était pas encore un dessinateur "publiable" à l’époque. Son dessin était très rustique, très carré. Goscinny hésitait un peu. Comme d’autre dessinateurs prestigieux de l’époque comme Gébé, Reiser, Goscinny nous avait chargé de mettre au propre les dessins de Fred qui étaient encore trop brouillons. C’était assez aberrant et ça a fini par éclater assez vite et ce grand caricaturiste a pu être publié pour ce qu’il était. Ça ne me plaisait pas de dessiner sur un scénario pré-établi sur lequel je n’avais pas de prises. C’est là que Christin, qui vivait à Bordeaux trois jours par semaine comme professeur de journalisme à l’I.U.T a choisi de se lancer dans la carrière de scénariste avec moi. J’avais écrit quelques scenarii avant mais ma plume littéraire collait mal avec le format BD. On a appris le scénario de BD l’un a côté de l’autre avec plus ou moins de bonheur.

Les années 60/70 passent et des bouleversements surviennent.
Il y a eu une espèce de fronde, de contestation, non pas contre Goscinny, mais c’est surtout qu’on voulait avoir plus de liberté de création graphique et artistique qui manquait beaucoup au journal de l’époque qui était, avouons-le, assez laid. Il manquait une direction artistique, on voulait plus d’improvisation. Goscinny était enfin au sommet de sa carrière et des petits gluons étaient en train de secouer son siège ; c’est quelque chose qu’il a assez mal pris, alors que Charlier, qui était un peu mieux informé de nos revendications, ne trouvait pas ça dramatique. Goscinny a fini par dire « Puisque vous voulez de l’innovation, nous allons faire 8 pages d’actualité par semaine. Rendez-vous lundi pour une réunion de la rédaction. Apportez vos idées. » On fait un tour de table, on lance nos idées. Untel ferait trois pages sur tel sujet, untel ferait trois autres. À rendre pour mercredi car le jeudi ça partait à l’impression. C’était un travail qui apportait beaucoup de pression, plus proche du dessin de presse que de la BD mais ça nous donnait cette part d’improvisation, nous permettait de faire des histoires en une ou deux pages, de changer de style et de partenaire. Je me suis retrouvé avec Fred à dessiner sur ses histoires. C’était une période de grande créativité mais qui atteignait une limite sur ce que Goscinny pouvait accepter dans un journal pour les jeunes. Dès que Gotlib avait envie de dessiner des bistouquettes, dès que Moebius commençait à élaborer des trucs qui sentaient un peu la fumette, là, ça coinçait. Mandrika, Bretecher et Gotlib ont alors quitté Pilote pour fonder L’écho des Savanes. Ça a été le grand clash. Puis est venu Métal Hurlant où Dionnet qui avait fait quelques scénarios dans Pilote, Moebius qui faisait ses planches de Blueberry la journée et ses planches de Moebius la nuit "pour se reposer", Druillet qui faisait du Druillet en petit ou grand format. Tout ça, c’était un bouleversement pour Pilote qui l’a mal pris. Personnellement, j’étais déjà dessinateur de Science-Fiction depuis déjà 10 ans dans Pilote, et même si j’étais invité à participer à Métal Hurlant, ça ne m’intéressait pas trop et je ne m’y suis pas senti bien. Les grands talents de Métal Hurlant ont drainé pas mal de dessinateurs qui étaient un peu des suiveurs et ce n’était pas les grands copains de Pilote.

C’est au début des années 70 que le série Valérian a décollé. De quand date le premier album ?
La cité des eaux mouvantes est paru en 1970. C’était un remontage de deux histoires de 30 pages qu’on a coupé pour faire un récit de 44 pages. L’éditeur a depuis ressorti ces deux histoires en version intégrale. Les ventes étaient ridicules pour l’époque mais c’était un autre contexte. Il sortait un album tous les 6 mois et au dos de la couverture de la cité des eaux mouvantes on trouvait une vingtaine de titres qui représentaient l’intégralité de la production de Dargaud de l’époque.

Et maintenant, combien d’albums vendus au total ?
Je ne sais pas. Dargaud dit 2.300.000. C’est vrai que c’est pas mal. On a eu beaucoup de rééditions. La plupart des albums ont été réimprimés dans différents formats. Le dernier album s’est vendu à 50.000 exemplaires. C’est moins qu’à la grande époque mais les condition de stockage et de réimpression ont beaucoup changé.

Dans les années 70, le monde évolue et on se rend compte que Valérian que l’on pensait être une série pour enfants avait développé des thèmes plus proches des préoccupations des adolescents et adultes. Écologie, féminisme... On ressent une sensibilité de Gauche typée années 70.
Politiquement, c’étaient des années de politisation très fortes. Valérian n’a jamais eu pour vocation d’être une Bande-Dessinée militante. On voulait surtout faire une BD qui soit en accord avec nos préoccupations et nos goûts pour faire quelque chose qui ne suive pas les balises des histoires classiques où le héros poursuit le méchant et l’histoire prend fin quand il le bat. On pensait que c’était plus intéressant de poser une problématique et de ne pas forcément chercher à la résoudre. Valérian et Laureline sont des témoins qui exposent leurs points de vue, se posent des questions. Le lecteur pourra lire la suite avec le fait qu’on ne propose pas de solution. Et Dieu sait que déjà aujourd’hui les problèmes sont insolubles, alors dans le futur, vous n’imaginez pas...

Le choix des couleurs est très important en Bande-Dessinée. Comment se déroule ce travail ?
Il se trouve que j’ai pu avoir la meilleure coloriste qui soit pour une BD, et que c’est ma sœur, Évelyne Tranlé. C’est très bien car bien qu’on ne travaille pas ensemble, il me suffit de lui donner les ambiances (là, c’est clair ; là c’est bleu). Quand elle me les rapporte, je n’ai plus qu’à faire quelques petites retouches car c’est de la gouache à l’ancienne. Elle ne travaille pas à l’ordinateur et moi non plus. On prouve qu’on peut travailler encore de manière traditionnelle au lieu de faire le travail sur ordinateur.

Valérian procède dans la Science-Fiction française en Bande-Dessinée comme procédaient les auteurs américains de roman qui, à travers la fiction, abordaient des problématiques très personnelles, politique, sociétales... Je pense que Pierre Christin a été très influencé par ces auteurs. Vous, vous avez un peu transposé dans la BD française cette tradition. Vos envies et préoccupations sont véhiculées par la Bande-Dessinée qui constitue un support idéal.
Ce qui m’intéresse n’est pas tant de dessiner les boulons de la fusée, mais imaginer la fusée d’une civilisation extra-terrestre sur une autre planète avec sa propre architecture. C’est le plaisir qu’il y a à faire de la SF : créer la logique d’un monde qui n’est pas basé sur le nôtre. À l’auteur d’avoir l’énergie (ou pas) de trouver de bonnes idées. Parfois ça rame fort et ça ne passe pas, et quelquefois c’est une super idée. Ce qui me plaît le plus, c’est le graphisme. La Science-fiction en elle-même n’est pas une de mes préoccupations. Par contre, c’est la porte ouverte à l’imaginaire et je trouve ça extraordinaire d’avoir passé 45 ans à raconter des histoires qui se passent sur des planètes et des environnements qui peuvent être complètement différents des uns des autres dans un grand esprit de liberté. Et ça, c’est vraiment une chance.

Les années 70 passent, tu vas rencontrer des personnes qui s’intéressent à ton travail, en particulier dans le milieu du cinéma.
En 1977, alors qu’on vient de terminer Les Héros de l’Equinoxe, il y a un cinéaste américain qui sort un petit film de SF. Les copains me disent « Tiens, il y a ce petit film qui s’appelle Star Wars, ça ressemble vachement à du Valérian. Tu devrais aller voir. » Je vois le truc, c’était plaisant, pas très bien fichu mais bon... Et puis Star Wars évoluant et devenant ce que c’était, j’ai commencé par m’apercevoir qu’il y avait des ressemblances assez étonnantes avec des passages que j’avais dessiné. Par exemple, la Princesse Leia en bikini doré sur le pont d’un navire découvert en plein désert. Et si vous regardez Le pays sans étoiles, Laureline, dix ans plus tôt se bat en bikini doré sur un navire volant au dessus du désert. Dark Vador qui se met un casque sur la tête pour masquer son visage brûlé alors que les Connaisseurs dans L’Empire des Milles Planètes (1970) enlèvent leurs casques pour montrer qu’ils ont le visage brûlé. Quand on dessine des extra-terrestres il se trouve qu’on a un spectre assez large et il se trouve que Watoo a les mêmes caractéristiques que les Shingouz. J’ai écrit une fois à George Lucas, je n’ai jamais reçu de réponse. Je lui ai dit qu’on avait des univers très proches, j’ai été poli et gentil, mais il n’a jamais répondu.
Un jour, en 1991, je reçois un coup de téléphone de Luc Besson qui me dit « Je pense que les américains t’ont suffisamment pillé. Moi, je t’engage et je voudrais te payer pour que tu travailles sur mon prochain film de SF qui va s’appeler Zaltman Bléros. » On se voit et on signe un contrat pour 100 jours de production, ce qui est énorme, presque toute l’année 1992. Ce qui est marrant, c’est que Christin avait commencé à écrire le scénario des Cercles du pouvoir sur lequel j’avais commencé à travailler quand j’ai reçu le fameux coup de téléphone. À la page 3, Valérian et Laureline rencontrent le fameux chauffeur de taxi volant Limouzingue plus pourri encore que les taxis du Bronx. Je mets entre parenthèses le travail sur Valérian et je lis le scénario de Zaltman Bléros qui était un ouvrier dans une usine de fusées de la banlieue de New-York. L’ambiance futuriste était là, il se passait des tas de choses un peu similaires au film qu’on connaît mais il n’y avait absolument pas de taxi volant. Dans un dessin de gratte-ciels en vue plongeante que j’avais fait, j’ai intégré le taxi des Cercles du pouvoirs. Luc regarde le dessin et dit « Ils sont marrants tes taxis ! ». À la fin de l’année 92, Besson part aux États-Unis car il n’avait pas réussi à trouver de financement pour Zaltman Bléros et il tourne le film Léon qui cartonne à l’international. Entre temps, j’ai fini de dessiner Les Cercles du Pouvoir et je le lui envoie à New-York l’album avec le gros taxi jaune en couverture. Quand il a vu la couverture, il a du se dire « Les taxis volants, c’est pas une mauvaise idée. » Avec le succès de Léon, les producteurs mettent de l’argent dans son prochain film, il réécrit le scénario et le héros qui n’était pas encore Bruce Willis devient chauffeur de taxi au lieu d’être ouvrier. Mon seul regret, c’est que j’avais dessiné un décor d’usine de fusées absolument monumental et qu’il n’a finalement pas été utilisé, mais les taxi volants, c’était pas mal aussi.

Tu collabores donc au Cinquième Élément.
Oui, pendant un an. Moebius était engagé aussi dessus mais il n’a beaucoup travaillé sur le projet. Besson voulait surtout se servir de nos noms pour montrer les univers de la Bande-Dessinée française. On a été très bien traités et ce film-là représente très bien l’univers que je dessine avec des partie qui sont des créations de Besson. Les décorateurs ont aussi été extrêmement fidèles. J’ai été invité aux Studio Pinewood à Londres pour voir le tournage du Grand Opéra. Ça fait quelque chose de marcher dans ce décor et de se dire « C’est mon dessin ! » C’était une belle aventure.

Après cette collaboration, tu continues Valérian jusqu’en 2010 avec l’avant dernier album qui marque un peu la fin de l’aventure.
Le paradoxe dans le premier album de Valérian en 1968 c’est qu’on avait annoncé qu’il allait y avoir un cataclysme nucléaire sur la Terre en 1986. On continuait de produire des albums et on se rapprochait des années 80. En tant que scénariste, Christin se devait, par souci de cohérence faire en sorte que le cataclysme soit évité tout en laissant la possibilité de continuer. On s’est alors retrouvé avec la Terre qui se dédouble, Galaxity qui disparaît et Valérian qui part à sa recherche (Je suis très content quand c’est Pierre qui explique ça, car ça me dépasse un peu). Il fallait bien qu’il y parvienne un jour et en retrouvant Galaxity à la fin de son périple, il découvre que ce n’est pas si bien que ça. On a bouclé la boucle de la recherche de Galaxity et on a dit, bon, c’est fini. Mais tant que Pierre et moi, on n’est pas encore mort, on a envie de travailler encore un peu. On a donc eu envie de faire des retours en arrière à l’intérieur des anciennes histoires pour pouvoir découvrir des choses qu’on n’avait pas eu le temps de développer. Les scénarios de Christin sont denses et qu’il fallait faire tenir tout ça sur un nombre de pages limitées. Ce qui m’amuse en tant que dessinateur c’est de reprendre des thèmes qu’on avait à peine eu le temps d’aborder pour les redécouvrir et les réinventer en prenant tout notre temps et avec une totale liberté artistique.

Valérian est une œuvre majeure de Science-Fiction qui a ouvert la voie et fait naître des vocations à des générations de dessinateurs.
Je n’ai pas spécialement envie qu’on me copie mais si mes histoires donnent envie à des jeunes de raconter des histoires à leur manière, ça c’est formidable.

On disait à la conférence avec Yoann qu’il était venu te voir à 17 ans pour montrer ses dessins et tu l’avais conseillé. Tu fais ce que Jijé avait fait pour toi ?
J’avais rencontré Franquin quand j’avais 17 ans. Jijé, je l’ai rencontré avec Giraud et on lui avait montré nos dessins. Inutile de dire que Jijé s’est plus attardé sur les dessins de Giraud que les miens, tant il était prometteur déjà à l’époque. C’est un peu une tradition en Bande Dessinée. On est des artisans un peu solitaires, notre travail est parfois répétitif. C’est toujours intéressant de se confronter à la critique. Pas tant pour dire « c’est pas bien » que « As-tu bien choisi l’angle, la prise de vue. Est ce qu’au niveau narratif c’est compréhensible pour tout le monde ? » La Bande Dessinée, c’est un récit où on prend le lecteur par la main à la page 1 et on ne le lâche pas jusqu’à la page 50. C’est un rapport de génération et on est très nombreux à faire ça même encore maintenant.

Est ce que tu aurais envie de faire un album de 120 pages, ou des projets d’avenir ?
En trichant un peu je dirait que j’ai déjà fait bien plus que 120 pages de Valérian. (rire) Et puis je ne suis pas un de ces dessinateurs stakhanovistes qui font trois albums en même temps pour plusieurs éditeurs. Il y aura probablement encore quelques albums à mettre en chantier. A part ça, Luc Besson aimerait beaucoup faire un film de Valérian, mais ça fait bien 10 ans qu’il en parle alors je crois qu’il ne faut pas être trop pressé.


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